Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 3, Lemerre, 1890.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


Cet autre, pour s’en faire un charme,
Dans un sachet, d’un chiffre orné,
Coud des violettes de Parme,
Frais cadeau qu’on reprend fané.

Celui-ci baise la pantoufle
Que Cendrillon perdit un soir ;
Et celui-ci conserve un souffle
Dans la barbe d’un masque noir.

Moi, je n’ai ni boucle lustrée,
Ni gant, ni bouquet, ni soulier,
Mais je garde, empreinte adorée,
Une larme sur un papier :

Pure rosée, unique goutte,
D’un ciel d’azur tombée un jour,
Joyau sans prix, perle dissoute
Dans la coupe de mon amour !

Et, pour moi, cette obscure tache
Reluit comme un écrin d’Ophir,
Et du vélin bleu se détache,
Diamant éclos d’un saphir.

Cette larme, qui fait ma joie,
Roula, trésor inespéré,
Sur un de mes vers qu’elle noie,
D’un œil qui n’a jamais pleuré !