Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/237

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

repliant sur eux-mêmes. De l’un et l’autre côté s’élèvent de vastes rochers dont la cime menace les cieux, et, sous l’abri desquels la mer inoffensive se repose en silence. Au-dessus, s’élève en amphithéâtre une épaisse forêt aux feuilles frémissantes, qui étend sur la baie l’horreur de ses ténèbres. Du côté opposé, des rochers suspendus forment une grotte qui renferme des eaux douces, et dont la roche vive forme des bancs : cette grotte semble la demeure des nymphes. Là, les navires fatigués par les orages ne sont ni retenus par aucun lien, ni enchaînés par la dent recourbée de l’ancre. C’est là qu’Énée se réfugie avec sept vaisseaux, les seuls de sa flotte qu’il ait pu réunir. Empressés de toucher la terre, les Troyens s’élancent, s’emparent du rivage tant désiré, et reposent sur la grève leurs membres ruisselants d’eau salée.

D’abord Achate, d’un caillou qu’il frappe, fait jaillir l’étincelle : il la reçoit sur des feuilles desséchées, rassemble, pour nourrir le feu, des branches arides, et bientôt de ce foyer la flamme s’élève. Puis, les Troyens, pressés par le besoin, retirent des vaisseaux les grains que l’onde a pénétrés, et les instruments de Cérès ; ils font sécher le blé sauvé du naufrage, et se préparent à le broyer sous la pierre.

Cependant Énée gravit un rocher et promène au loin un regard inquiet sur toute l’étendue des mers. Il cherche s’il apercevra