Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/249

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ni les approcher, ni retarder leur marche, ni s’enquérir du sujet de leur voyage. Alors elle-même, s’élevant dans les airs, revole vers Paphos, et se plaît à revoir ce séjour qu’elle aime, où son temple et cent autels exhalent les doux parfums de l’encens de Saba et des plus fraîches guirlandes.

Cependant, les deux guerriers s’avancent d’un pas rapide dans le sentier qui les conduit. Déjà ils gravissent le coteau qui domine Carthage, et d’où l’œil découvre ses tours et ses remparts. Énée admire cette masse d’édifices, à la place où furent des cabanes. Il admire les portes et les rues que l’on construit, et le bruit de la foule. Les Tyriens pressent avec activité leurs travaux. Les uns prolongent les murs d’enceinte, élèvent la citadelle, et de leurs mains roulent d’énormes pierres. Les autres choisissent le terrain où sera leur toit, et le soc l’entoure d’un sillon. Ici on crée des lois, on élit des magistrats, on forme un sénat auguste ; là on creuse le port ; là on jette les fondements d’un grand amphithéâtre, et l’on taille dans le roc de hautes colonnes, ornements pompeux de la scène future. Telles les abeilles, quand le printemps est de retour, hâtent leur travail sous un ciel pur, dans les campagnes fleuries. Soit qu’elles conduisent hors de la ruche le jeune essaim qu’elles ont élevé ; soit qu’épaississant le miel liquide, elles gonflent leurs cellules de ce doux nectar ; ou qu’elles