Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/34

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de Virgile à Auguste, un ample mot, mais qui atteste à la fois tout le soin qu’il mettait et la diversité d’études qu’il faisait entrer dans la composition de son poëme. Auguste demandait instamment à en lire au moins une partie, et pressait le poëte : « Je reçois fréquemment de vos lettres, répondait Virgile… En ce qui est de mon Énée, si, en vérité, je le voyais déjà digne de vous être lu, je vous l’enverrais bien volontiers. Mais une si grande chose n’est qu’à l’état d’ébauche : il y a des moments où je crois que j’étais peu dans mon bon sens lorsque j’ai entrepris un si grand ouvrage ; d’autant plus, comme vous le savez, que je suis forcé d’y joindre, pour le bien traiter, d’autres études et d’un ordre beaucoup plus élevé. » Ainsi parlait cette conscience scrupuleuse, jalouse d’enfermer le plus de docte matière sous la plus noble forme, et toujours inquiète du mieux. À la fin pourtant, lorsqu’il crut avoir suffisamment achevé les premiers livres et les avoir amenés à peu près jusqu’à ce degré de perfection qu’il imaginait, il se laissait vaincre, et il les lisait à Auguste devant Octavie, en cette scène touchante que la peinture a consacrée, et dans l’attitude modeste où la postérité continuera de le voir.

On a varié sur le lieu où mourut Virgile. Quelques-uns l’ont fait finir à Tarente ; mais la version généralement adoptée est qu’il mourut à Brindes, l’an de Rome 735, à l’âge de cinquante-deux ans, en revenant de la Grèce, où il était allé pour perfectionner son poëme et pour y visiter, et de là jusqu’en Asie, les lieux principaux du pèlerinage d’Énée. Ce départ de Virgile pour la Grèce est resté mémorable et cher à tous par l’ode d’Horace. Il n’alla, dit-on, que jusqu’à Athènes, où il rencontra Auguste qui revenait d’Orient, et, déjà malade, il retourna avec lui jusqu’à Brindes, où il trouva le terme de sa vie. Il fut enseveli à Naples, avec l’épitaphe qu’on sait, et qu’il s’était composée à lui-même. Ceux qui ont monté la douce colline du Pausilype aiment à croire que c’est là qu’il repose. Il avait longtemps et habituellement vécu dans ces contrées.