Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/602

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dit : « Ô ma sœur, ô mon épouse chérie, ainsi que vous le pensiez avec raison, Vénus protége les Troyens ; ils n’ont ni force ni courage dans les combats, ni constance dans le danger. » — « Auguste et cher époux, lui répond Junon d’un ton soumis, pourquoi réveiller les chagrins d’une épouse qui redoute vos paroles amères ? Si votre amour pour moi était ce qu’il fut, ce qu’il devrait toujours être, vous ne me refuseriez pas, vous qui pouvez tout, la faveur d’arracher Turnus aux combats, et de le conserver sain et sauf à son père Daunus. Qu’il périsse donc, et que son sang généreux satisfasse la haine des Troyens. Son origine pourtant le rattache à nous : il compte Pilumnus au nombre de ses aïeux, et souvent sa main a chargé vos autels de riches offrandes. » Le roi de l’Olympe éthéré lui répond en peu de mots : « Si c’est un délai et quelques jours de plus à vivre que vous me demandez pour ce jeune guerrier qu’attend une mort prochaine, et si vous comprenez bien que là doit se borner la grâce que vous me demandez, enlevez Turnus, et dérobez-le par une prompte fuite au destin qui le menace. Ma complaisance peut aller jusque-là ; mais si votre prière cache des vœux plus hardis, si vous croyez que le sort des combats va changer au gré de vos désirs, vous nourrissez une vaine espérance. » — « Pourquoi, dit Junon en