Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/615

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des tempes du belliqueux coursier ; l’animal se cabre, bat l’air de ses pieds, renverse son cavalier, et tombe lui-même sur son maître, qu’il embarrasse et accable de son poids. Les Troyens, les Latins remplissent à la fois le ciel de leurs clameurs.

Énée accourt, tire son glaive du fourreau : « Où est maintenant, dit-il, ce terrible Mézence ? qu’est devenue son indomptable audace ? » Mézence, revenant à lui, lève les yeux au ciel : « Impitoyable ennemi, pourquoi m’outrager et me menacer de la mort ? tu peux sans crime m’égorger ; je ne suis pas venu au combat pour être épargné ; et mon Lausus n’a point fait avec toi ce honteux traité. Je ne te demande qu’une grâce (s’il en est une pour l’ennemi vaincu) : permets qu’un peu de terre couvre mon corps. Je n’ignore point de quelle haine implacable je suis l’objet. Je t’en conjure, dérobe mes restes à tant de fureur, et fais-moi partager le tombeau de mon fils. » Il dit, reçoit dans la gorge le fer qu’il attendait ; et son âme s’enfuit avec des flots de sang dont ses armes sont inondées.