Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/637

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se précipite dans le palais, et remplit la ville d’une vive terreur : « Voilà les Troyens ! Voilà l’armée tyrrhénienne ! Ils descendent des rives du Tibre en ordre de bataille, et inondent au loin la plaine. » Aussitôt les cœurs se troublent ; les esprits ébranlés s’émeuvent et s’agitent sous l’aiguillon terrible de la colère : on demande à grands cris des armes ; la jeunesse frémit, impatiente de voler au combat ; les vieillards pleurent et murmurent ; un bruit confus de clameurs discordantes s’élève jusqu’au ciel. Ainsi retentit de cris divers un bois profond où viennent de fondre des légions d’oiseaux ; ou tels encore l’Éridan poissonneux et l’écho babillard des étangs voisins répètent le chant rauque des cygnes rassemblés sur leurs bords. Aussitôt, profitant de l’occasion : « Courage ! s’écrie Turnus, délibérez tranquillement, et vantez-nous les charmes de la paix, tandis que l’ennemi se jette sur la patrie les armes à la main ! » Sans en dire davantage, il s’échappe à l’instant et s’élance hors du palais. « Volusus, dit-il, fais prendre les armes aux Volsques, et arme tes Rutules ; que Messape et son frère Coras déploient leur cavalerie dans la plaine ; que l’on s’assure de toutes les issues de la ville ; que les tours soient garnies de soldats, et que le reste de l’armée soit prêt à marcher où mes ordres l’appelleront. »

Déjà, de toutes les parties de la ville, on court aux remparts. Latinus, troublé de ce contre-temps funeste, quitte le conseil