Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/676

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plonge la lame brillante dans la gorge, en ajoutant ces mots : « Les voilà, ô Troyen, ces champs que tu voulais conquérir par la guerre ; mesure l’Hespérie avec ton corps gisant : tel est le prix que je réserve à ceux qui osent m’attaquer par le fer ; c’est ainsi qu’ils bâtissent des villes. »

Asbutès, Chlorée, Sybaris, Darès, Thersiloque, Thymétès renversé sur le cou de son cheval abattu, vont bientôt rejoindre Eumède. Ainsi, lorsque, du fond de l’Édonie, Borée se précipite avec fracas sur la mer Égée, les flots, violemment repoussés par les vents, viennent battre le rivage, et les nuages fuient à travers le ciel : tels, partout où Turnus s’ouvre une voie dans la mêlée, les bataillons plient, et les combattants en déroute se dispersent : le héros s’abandonne tout entier à sa fougue, et la brise qui vient au-devant de son char agite son aigrette ondoyante. Indigné de tant d’acharnement et d’audace, Phégée s’élance vers le char, et, saisissant par le frein écumant les ardents coursiers de Turnus, s’efforce de détourner leurs pas. Tandis qu’il est entraîné et demeure suspendu au joug, la large javeline atteint son dos resté découvert, pénètre au travers de sa cuirasse à double maille, et l’effleure d’une légère blessure. Il se retourne alors, oppose son bouclier à l’ennemi, et, brandissant son glaive, il appelait ses com-