Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/80

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sier, qu’on vit si souvent dans les carrefours, fredonnant de misérables airs sur ton aigre chalumeau ?

DAMÈTE.

Eh bien, veux-tu que nous fassions, tour à tour, l’essai de nos talents ? Tu vois cette génisse (ne la dédaigne pas ; deux fois chaque jour on la trait, et elle nourrit deux petits) ; elle sera mon enjeu ; et toi, quel est ton gage ?

MÉNALQUE.

De mon troupeau je n’oserais rien hasarder dans ce défi ; car j’ai à la maison un père avare et une injuste marâtre. Matin et soir, l’un et l’autre comptent mes brebis, et l’un d’eux compte aussi mes chevreaux. Mais voici, puisque tu veux faire une folie, un gage bien supérieur au tien ; toi-même tu en conviendras : ce sont deux coupes de hêtre ciselées, chefs-d’œuvre du divin Alcimédon : son ciseau facile les a couronnées d’une vigne flexible, et y a jeté çà et là des grappes qu’un lierre revêt de son pâle feuillage. Au milieu, sont deux figures, Conon, et… quel est l’autre dont le compas a mesuré le monde, et marqué le temps du labour, le temps de la moisson ? Ces coupes, je ne les ai point encore approchées de mes lèvres ; je les garde soigneusement renfermées.