Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/121

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

appuya son mouchoir sur sa figure, sanglota avec force et pleura, ou tout au moins feignit de pleurer ; enfin, pour nous servir du langage d’Holliday, elle exécuta la manœuvre à merveille.

« Maintenant, » continua le soldat un peu radouci, « si vous avez quelque chose à vous conter, dites-le en deux minutes, et tournez-moi les talons ; car si cet ivrogne de Bothwell se mettait en tête de faire la ronde une demi-heure trop tôt, ce serait une vilaine affaire pour nous tous. — Adieu, Édith, » dit Morton à voix basse, en affectant un ton de fermeté qu’il était loin de posséder ; « ne restez pas ici, abandonnez-moi à mon sort ; il n’est pas insupportable, puisque vous vous y intéressez. Bonsoir, bonsoir ! n’attendez pas qu’on vous découvre ici. »

En prononçant ces mots, il la remit à sa suivante, qui la conduisit, ou plutôt la porta hors de l’appartement.

« Chacun son goût, sans doute, dit Holliday ; mais du diable si j’aurais voulu faire de la peine à une aussi aimable fille, quand il s’agirait de tous les républicains qui ont jamais prêté serment pour le covenant ! »

Quand Édith eut regagné son appartement, elle céda à une explosion de douleur qui effraya Jenny Dennison, qui se hâta de lui offrir toutes les consolations qui lui venaient à l’esprit.

« Ne vous affligez pas trop, miss Édith, dit la fidèle suivante ; qui sait le secours qui peut arriver au jeune Milnwood ? C’est un brave et honnête jeune homme, un gentilhomme de belle fortune, et ils ne pendent pas les gens comme lui aussi lestement que les pauvres républicains qu’ils attrapent dans les plaines et qu’ils enfilent comme des oignons ; peut-être son oncle le tirera d’affaire, ou peut-être que votre grand-oncle parlera pour lui. Il connaît bien tous les messieurs à habits rouges. — Vous avez raison, Jenny ! vous avez raison, » dit Édith se remettant de la stupeur où elle était tombée. « Ce n’est pas le moment de se désespérer, il faut agir ; il faut que vous me trouviez quelqu’un qui porte, cette nuit même, une lettre à mon oncle. — À Charnwood, madame ? il est bien tard, et il y a six milles et plus à faire le long de l’eau : je doute que nous puissions trouver un homme et un cheval pour la nuit, d’autant plus qu’on a établi un factionnaire à la porte. Pauvre Cuddie ! il est parti, ce pauvre garçon, qui aurait fait tout au monde quand je le lui commandais, sans demander une seule raison, et je n’ai pas encore eu le temps de faire connaissance avec le nouveau garçon de charrue ; et cepen-