Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/171

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ces rustres inexpérimentés. Qu’en dites-vous, milord Evandale ? — Je pense humblement, dit lord Evandale, que, quel que soit le résultat de la journée, elle sera sanglante, et que nous perdrons plus d’un brave, et que probablement nous serons obligés d’égorger un grand nombre de ces hommes égarés qui, après tout, sont des Écossais et des sujets du roi Charles aussi bien que nous. — Des rebelles ! des rebelles ! et qui sont indignes du nom d’Écossais ou de sujets, dit Claverhouse. Mais voyons, milord, à quoi tend votre opinion ? — À traiter avec ces hommes ignorants et égarés, dit le jeune noble. — Traiter ? et avec des rebelles qui sont sous les armes ? Jamais tant que je vivrai, répondit le colonel. — Au moins envoyez un parlementaire qui leur ordonnera de déposer leurs armes et de se disperser, reprit lord Evandale, avec promesse d’un libre pardon. J’ai toujours ouï dire que si l’on eût fait ainsi avant la bataille de Pentland-Hills, on aurait épargné beaucoup de sang. — Eh bien, dit Claverhouse, qui diable portera cet ordre à ces fanatiques opiniâtres et exaspérés ? Ils ne reconnaissent nulle loi de la guerre. Leurs chefs, qui ont tous eu part à l’assassinat de l’archevêque de Saint-André, combattent la corde au cou, et sont capables de tuer le messager, quand ce ne serait que pour faire tremper leurs complices dans un assassinat, afin de leur ôter tout espoir de pardon tout aussi bien qu’à eux. — J’irai moi-même, dit Evandale, si vous voulez me le permettre. J’ai souvent risqué mon sang pour répandre celui des autres ; permettez que je le fasse maintenant pour sauver des hommes. — Vous n’irez pas, milord, dit Claverhouse ; votre rang et votre situation rendent votre vie trop importante pour le pays, dans un siècle où les bons principes sont si rares. Voici le fils de mon frère Dick Graham, qui craint le plomb et l’acier aussi peu que si le diable lui avait donné une armure à l’épreuve, ainsi que les fanatiques disent qu’il en a donné une à son oncle. Il se rendra en parlementaire, accompagné d’un trompette, sur le bord du marécage, pour leur ordonner de déposer les armes et de se disperser. — De toute mon âme, colonel, répondit le cornette, et je vais attacher ma cravate au bout d’une pique pour servir de drapeau blanc. Les coquins n’ont jamais vu de leur vie un morceau de dentelle de Flandre. — Colonel Graham, » dit Evandale tandis que le jeune officier s’apprêtait pour son expédition, « ce jeune gentilhomme est votre neveu et probablement il sera votre héritier ; pour l’amour de Dieu, permettez-moi d’y aller ; c’était mon avis, et je