Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/263

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haut qu’Aman… C’est un temps malheureux… mais on n’y peut rien faire… Asseyez-vous donc, et mangez une croûte de pain avec du fromage, tandis que je vais apporter quelque chose de meilleur. Je ne vous en aurais pas dit un seul mot si j’avais pensé que cela pût vous empêcher de dîner. — Qu’ils aient fini ou non leur avoine, s’écria Morton, Cuddie, sellez les chevaux à l’instant ; nous ne devons nous arrêter que devant le château ! »

Et malgré toutes les prières d’Ailie, ils se remirent aussitôt en route.

Morton ne manqua pas de frapper au presbytère de Poundtext, et l’engagea à le suivre au camp. L’honnête ministre venait de reprendre pour un instant ses habitudes pacifiques, et relisait un vieux traité de théologie, une pipe à la bouche et un petit pot de bière devant lui pour mieux digérer sa lecture. Ce fut avec le plus vif déplaisir qu’il s’arracha à ce délassement, qu’il appelait ses études, pour recommencer une course fatigante sur un cheval dont le pas était assez rude ; mais quand il fut plus longuement informé, il renonça avec un soupir profond au plaisir de passer une soirée tranquille dans son petit cabinet ; car il reconnut avec Morton que, quel que fût l’intérêt de Burley en rendant impossible par la mort de ce jeune seigneur une réconciliation entre les presbytériens et le gouvernement, les hommes modérés ne devaient, sous aucun prétexte, permettre un tel acte de cruauté. D’ailleurs, pour rendre justice à M. Poundtext, il faut dire qu’il avait, comme presque tous ceux du parti modéré, la plus vive horreur pour les actes de violence que la nécessité ne justifiait pas. Il était donc favorablement disposé pour prêter l’oreille aux raisonnements par lesquels Morton s’efforçait de lui prouver que lord Evandale pouvait servir de médiateur pour le rétablissement de la paix, à des conditions sages et honorables. Ainsi d’accord, ils achevèrent leur route, et arrivèrent enfin à onze heures du soir dans un petit village, près du château de Tillietudlem, où Burley avait établi son quartier-général.

Une sentinelle placée à l’entrée du village leur cria : « Qui vive ? » et les laissa passer quand ils eurent déclaré leurs noms et leurs grades. Ils en virent une autre devant une maison où, selon toute apparence, lord Evandale était emprisonné, car en face s’élevait une potence assez haute pour qu’on pût l’apercevoir des tours du château ; et cet instrument de supplice ne confirmait que