Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/279

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En parlant ainsi, il la salua avec dignité. Bien que le langage d’Édith fît voir qu’elle savait à qui elle parlait, elle ne s’était probablement pas attendue à ce qu’il se justifiât avec tant de chaleur. Elle lui rendit son salut d’un air embarrassé et en gardant le silence. Morton tourna bride et alla se placer à la tête de sa petite troupe, qui marchait à peu de distance du major et de lord Evandale.

« Henri Morton ! » s’écria le major en l’apercevant. — « Lui-même, répondit-il ; Henri Morton désespéré d’avoir encouru la disgrâce du major Bellenden et de sa famille. Il s’en remet à lord Evandale, » continua-t-il en se tournant vers le jeune seigneur et en lui faisant un salut, « du soin de détromper ses amis sur sa conduite et sur la pureté de ses intentions. Adieu, major : je vous quitte, mon escorte ne vous est plus nécessaire. Que le bonheur vous accompagne, vous et les vôtres ! Puissions-nous nous rencontrer dans des temps plus tranquilles et plus heureux ! — Croyez-moi, monsieur Morton, dit lord Evandale, votre confiance n’est pas mal placée. Je m’efforcerai de m’acquitter des éminents services que j’ai reçus de vous, en présentant votre caractère sous son véritable jour devant les yeux du major Bellenden et de tous ceux dont l’estime vous est chère. — Je n’attendais pas moins de votre générosité, milord, » répondit Morton.

Il appela alors les gens de sa suite, et se dirigea le long de la bruyère dans la direction d’Hamilton. On voyait leurs plumets ondoyer et leurs casques d’acier reluire aux rayons du soleil levant. Cuddie Headrigg, seul, resta un instant en arrière pour dire un tendre adieu à Jenny Dennison, qui, pendant son double voyage, avait su reprendre son empire sur le cœur sensible de son ancien amant. Un ou deux arbres voilèrent plutôt qu’ils ne cachèrent leur tête-à-tête pendant qu’ils avaient arrêté leurs chevaux pour se dire adieu.

« Adieu donc, Jenny, » dit Cuddie en poussant bruyamment son haleine, pour essayer peut-être de produire un soupir qui ne fut qu’une espèce de gémissement. Pensez quelquefois au pauvre Cuddie, un honnête garçon qui vous aime. Jenny, y penserez-vous de temps en temps ? — Sans doute ; chaque fois que je mangerai de la soupe, » répondit la malicieuse suivante, incapable de retenir sa repartie et le sourire qui l’accompagnait.

Cuddie se vengea comme ont coutume de faire les amants villageois et comme Jenny s’y attendait probablement. Il passa le