Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/198

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— Chien de juif ! » dit Athelstane dont la mémoire conservait le souvenir des plus légères bagatelles, et surtout des plus petites offenses, « ne te souvient-il pas comment tu t’es conduit envers nous dans la galerie, le jour du tournoi ? Fuis, ou combats les outlaws, ou compose avec eux, et n’attends ni aide ni secours de nous et de nos compagnons de route. Si les outlaws ne dévalisaient que des gens tels que toi, qui volent tout le monde, je les regarderais, pour ma part, comme les hommes les plus honnêtes qu’on puisse trouver. »

Cedric n’approuva point la sévérité de cette réponse. « Nous ferons mieux, » dit-il à son compagnon, « de leur laisser deux de nos hommes et deux de nos chevaux, pour les mettre en état de gagner le plus prochain village ; cela diminuera un peu nos forces, mais avec votre vigoureuse épée, noble Athelstane, et à l’aide de celles qui nous restent, il nous sera aisé de faire face à trente de ces vagabonds. »

Lady Rowena, quelque peu alarmée en apprenant qu’une bande d’outlaws n’était pas éloignée, appuya fortement l’avis de son tuteur. Mais Rébecca, quittant soudain sa place, et accourant vers le palefroi de la belle Saxonne, plia le genou devant elle, et baisa le pan de sa robe à la manière orientale ; se relevant ensuite et rejetant son voile en arrière, elle la supplia au nom du Dieu qu’elles adoraient toutes deux, et par cette révélation, sur le Sinaï, de la loi à laquelle toutes deux croyaient également, d’avoir pitié de leur détresse, et de leur permettre de voyager sous la sauve-garde d’une aussi digne protectrice. « Ce n’est pas pour moi que j’implore cette faveur, ajouta-t-elle, ni même pour ce vieillard, qui est mon père : je sais que dépouiller et maltraiter les gens de notre nation est une peccadille, si même ce n’est pas un mérite, pour des chrétiens ; et qu’importe que ce soit dans une ville, dans les champs, ou dans une forêt ? Mais c’est au nom d’un homme de votre peuple, d’un de vos frères, que je vous invoque : souffrez que nous le transportions sans danger sous votre protection ; car s’il lui arrivait malheur, les derniers jours de votre vie seraient empoisonnés par le regret de nous avoir fait un tel refus. » L’air noble et solennel avec lequel parlait Rébecca émut vivement la belle Saxonne. « Cet homme est vieux et faible, » dit-elle à son tuteur ; « cette fille est jeune et belle ; celui qu’ils accompagnent est blessé dangereusement peut-être : tout juifs qu’ils sont, ce serait nous montrer peu chrétiens de les abandonner dans cette extrémité. Il faudrait décharger deux de nos mules, et répartir le bagage entre les vassaux de notre suite.