Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/201

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homme sage m’apprît ce que je puis faire de celle dont je jouis maintenant. » Comme il parlait ainsi, il s’entendit appeler par quelqu’un à voix basse. « Wamba, » disait-on ; et en même temps un chien qu’il reconnut être Fangs accourut en sautant pour le caresser. « Gurth, » répondit Wamba avec la même précaution ; et immédiatement le gardeur de pourceaux se trouva près de lui. « De quoi s’agit-il ? lui dit ce dernier avec inquiétude. Que veulent dire ces cris, ce cliquetis d’armes ?

— C’est une bagatelle comme nous en voyons tous les jours ; ils sont tous prisonniers.

— Qui, prisonniers ? » s’écria Gurth avec impatience. « Milord, milady, Athelstane, Hundibert et Oswald.

— Ciel ! dit Gurth, comment cela se fait-il ? De qui sont-ils prisonniers ?

— Notre maître a été trop prompt à combattre, Athelstane ne l’a pas été assez, et parmi les autres, personne ne l’a été tant soit peu. Ils sont prisonniers de gens qui portent des casaques vertes et des masques noirs. Tous les nôtres gisent étendus sur le gazon comme les pommes que tu jettes à tes pourceaux ; j’en rirais, en vérité, si je pouvais m’empêcher de pleurer. « Et le bouffon ne put retenir les larmes d’une sincère douleur.

La physionomie de Gurth s’anima. « Mon ami, s’écria-t-il, tu as une arme, et ton cœur fut toujours meilleur que ta tête ; nous ne sommes que deux, mais une attaque soudaine de deux hommes bien résolus fera beaucoup ; suis-moi.

— Où, et pour quel dessein ? dit le bouffon.

— Pour délivrer Cedric.

— Mais tu as renoncé à son service ?

— J’y ai renoncé quand il n’avait pas besoin de mon secours. Suis-moi. »

Comme le bouffon se disposait à obéir, un autre individu parut tout-à-coup au milieu d’eux, et leur ordonna de s’arrêter. À son costume et à ses armes on pouvait le prendre pour un des outlaws qui venaient d’arrêter Cedric, car il avait comme eux un riche baudrier à son épaule, avec un cor de chasse non moins reluisant ; mais il ne portait point de masque. Son air calme, sa voix imposante suffirent à Wamba, malgré l’obscurité, pour reconnaître Locksley, le yeoman qui avait gagné le prix au tir de l’arc, en dépit du prince Jean.

« Que signifie tout cela ? dit l’archer ; et qui donc ose piller, rançonner, faire des prisonniers dans cette forêt ?