Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/105

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cité qui avait animé ses satires, et c’était à peine si on le tolérait à la cour ; car Jacques, bien que lui-même avancé en âge, conservait à un point singulier et même ridicule le désir d’être entouré de jeunes gens. Sir Mungo ayant vu se flétrir de la sorte sa jeunesse et sa fortune, ne montrait à la cour sa taille amaigrie et ses broderies fanées que lorsque son devoir l’exigeait absolument : il passait son temps à chercher un aliment à son humeur satirique dans les promenades publiques ou sous les voûtes de l’église de Saint-Paul ; qui était alors le rendez-vous des faiseurs de nouvelles et de gens de toute espèce. Mais il fréquentait surtout ceux de ses compatriotes qu’il regardait comme d’une naissance et d’un rang inférieur au sien. De cette manière, quoiqu’il détestât et méprisât le commerce et tous ceux qui l’exerçaient, il n’en passait pas moins la plus grande partie de sa vie avec les artistes et les marchands écossais qui avaient suivi la cour à Londres ; il pouvait se livrer à son cynisme avec eux, sans risquer de les offenser beaucoup, car quelques-uns souffraient ses plaisanteries et sa mauvaise humeur par déférence pour sa naissance et son titre de chevalier, qui, dans ce siècle, donnaient de grands privilèges, et d’autres plus sensés plaignaient et supportaient un vieillard malheureux par la fortune et par son caractère.

Au nombre de ces derniers était George Heriot qui, bien que ses habitudes et son éducation lui fissent porter son respect pour l’aristocratie à un point qui de nos jours paraîtrait ridicule, avait trop d’élévation d’âme et de bon sens pour se laisser importuner au-delà d’un certain point par un homme tel que sir Mungo Malagrowther, ou pour souffrir qu’il prît avec lui des libertés peu convenables, tout en le traitant néanmoins, non seulement avec une politesse respectueuse, mais même avec obligeance et générosité.

La manière dont sir Mungo se conduisit en entrant dans l’appartement prouva, d’une manière évidente, ce que nous venons de dire. Il alla saluer maître Heriot, ainsi qu’une femme d’un certain âge, qui portait une simple coiffe, dont l’air était respectable et un peu sévère, et qui sous le nom de tante Judith, faisait les honneurs de la maison et de la table : or ce double salut ne se ressentit presque pas de la causticité dédaigneuse de celui qu’il adressa successivement à David Ramsay et aux deux autres bons bourgeois. Il alla se mêler à la conversation de ces derniers pour leur dire qu’il venait d’entendre parler à Saint-Paul