Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/276

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Quentin s’en excusa pour cette fois, sous le prétexte d’un violent mal de tête pour lequel le grand air serait sans doute le meilleur remède ; et l’obligeant chapelain le laissa enfin à lui-même.

On imaginera aisément que, dans l’inspection qu’il fit alors beaucoup plus à loisir de chaque fenêtre, de chaque ouverture donnant sur le jardin, celles qui se trouvaient dans le voisinage de la petite porte par laquelle il avait vu, à ce qu’il présumait, Marton introduire Hayraddin dans l’appartement des comtesses, ne lui échappèrent point. Mais quoiqu’il eût constamment les yeux et les oreilles au guet, aucun bruit, aucun mouvement ne vint contredire ou confirmer ce que le Bohémien lui avait dit ; et le crépuscule commençant à s’étendre, il finit par craindre, sans trop savoir pourquoi, qu’une si longue promenade dans ce jardin ne parût suspecte et n’excitât quelque mécontentement ou quelque soupçon.

Il venait de se décider à partir, et il faisait, à ce qu’il croyait, un dernier tour sous les croisées qui avaient pour lui tant d’attraits, quand il entendit au-dessus de sa tête un léger bruit, comme de quelqu’un qui feint de tousser pour attirer l’attention d’une autre personne, sans éveiller celle des gens qui seraient à portée d’entendre. Levant les yeux avec un mouvement de surprise et de joie, Quentin vit une fenêtre s’entr’ouvrir ; une main de femme s’y montra, et laissa échapper un billet : il tomba sur un romarin qui croissait au pied du mur. La précaution qu’on employait pour lui faire parvenir ce billet lui prescrivait une égale prudence pour le lire. Le jardin, entouré de deux côtés, ainsi que nous l’avons dit, par les bâtiments du palais épiscopal, était nécessairement dominé par les fenêtres d’un grand nombre d’appartements ; mais il s’y trouvait une espèce de grotte que le chapelain avait montrée à Quentin avec une complaisance toute particulière. Ramasser le billet, le glisser furtivement dans son sein, et courir vers cette retraite mystérieuse, fut l’affaire d’un instant. Là, il ouvrit le précieux billet en bénissant la mémoire des moines d’Amberbrothock dont les soins l’avaient mis en état d’en lire le contenu.

La première ligne renfermait cette injonction : « Lisez en secret. » Le reste était conçu en ces termes : « Ce que vos yeux ont eu la témérité de me dire, les miens l’ont peut-être trop aisément compris. Mais une précaution injuste enhardit celle qui en est la victime, et il vaut mieux me confier à la reconnais-