Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/182

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coup d’essai une cause aussi difficile. Mais Alan, malgré cette sorte de respect, n’en sentait pas moins que lui et son compagnon étaient les sujets de nombreuses plaisanteries, et que c’était à leurs dépens que partaient alors les éclats de rire qu’on entend si souvent dans ce lieu.

À la fin, la patience du jeune avocat fut poussée à bout ; et craignant de perdre présence d’esprit et mémoire, Alan dit franchement à son père qu’à moins d’être délivré de la torture à laquelle le soumettait son client par sa présence et ses instructions, il fallait nécessairement qu’il déchirât ses conclusions, et renonçât à plaider la cause.

« Silence, silence, mon cher Alan, » répliqua le vieillard, à qui cette déclaration fit presque tourner la tête ; « ne faites pas attention aux sottises que débite cet insensé. Nous ne pouvons empêcher le pauvre homme d’entendre plaider sa propre affaire, quoiqu’il ait l’esprit un peu dérangé.

— Sur ma vie, mon père, je serai incapable de remplir ma tâche. — Il trouble tous mes esprits ; et, si j’essaie de parler sérieusement du tort qu’il a souffert et de la condition à laquelle il est réduit, ne dois-je pas m’attendre à ce que la seule vue d’un aussi ridicule épouvantail fasse de mon discours une véritable plaisanterie.

— Il y a quelque chose de vrai dans vos paroles, » reprit Saunders Fairford en jetant un coup d’œil sur le pauvre Pierre, et glissant d’un air mystérieux son index sous sa perruque à marteau pour se gratter le front et aider son Imaginative : « On ne pourra certainement pas voir une pareille figure à la barre sans rire : mais comment s’en dépêtrer ? C’est peine perdue que de lui parler le langage de la raison et du bon sens. — Attendez donc. — Oui, Alan, mon bien-aimé, un peu de patience ; je vais le renvoyer comme une balle au jeu de golf.

En parlant ainsi, il courut vers son allié, Pierre Drudgeit ; Celui-ci le voyant arriver avec tant de précipitation et l’inquiétude peinte sur le visage, accrocha sa plume derrière son oreille, et lui cria : « Bon Dieu ! qu’avez-vous donc, monsieur Saunders ? — Est-il arrivé malheur ?

— Voici un dollar, mon ami, dit M. Saunders ; à présent ou jamais, Pierre, rendez-moi un service. Votre homonyme, que vous voyez là, ce Pierre Peebles, va pousser les pourceaux à travers nos superbes écheveaux de laine filée. — Emmenez-le au café