Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/197

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crut prudent de répliquer que l’affaire « qui rendait la présence de son fils Alan à la campagne absolument nécessaire, regardait un jeune homme, possesseur d’une grande fortune, qui était l’ami particulier d’Alan, et qui ne faisait jamais une démarche importante sans consulter le jeune et savant avocat.

« Bien, bien, M. Fairford, vous savez votre affaire mieux que personne, répliqua le doyen ; s’il est question de mort ou de mariage, un testament ou une noce doivent passer avant toute autre affaire. Je suis heureux d’apprendre que M. Alan est assez bien rétabli pour avoir pu se mettre en route, et je vous souhaite le bonsoir. »

Après s’être placé sur ce pied-là avec le doyen de la faculté, M. Fairford se hâta d’écrire des billets, en réponse aux trois juges qui avaient envoyé savoir des nouvelles de son fils, expliquant l’absence d’Alan de la même manière. Lorsqu’il les eut cachetés, et qu’il eut écrit les adresses, il les remit à James, en lui recommandant de congédier messieurs les laquais, qui, pendant ce temps-là, avaient consommé un gallon de bière à deux pence, en discutant des points de droit, et en se désignant les uns les autres par les titres de leurs maîtres.

L’occupation que lui donnaient ces différents soins, et l’intérêt que tant de personnes de considération semblaient prendre à son fils, allégèrent beaucoup le poids qui pesait sur l’esprit de Saunders Fairford, et il continua de parler mystérieusement de l’affaire fort importante qui avait forcé son fils à s’éloigner, même avant la fin de la session, qui était très-prochaine. Il tâcha d’appliquer le même remède à son cœur : mais là, le succès fut loin d’être complet ; car sa conscience lui disait qu’aucun résultat, quelque important qu’il fût, auquel on parviendrait dans l’intérêt de Darsie Latimer, ne balancerait la perte de réputation à laquelle s’exposait Alan en abandonnant la cause du pauvre Pierre Peebles.

Durant ce temps, le brouillard qui enveloppait la cause de cet infortuné plaideur, et qui avait été un moment dissipé par l’éloquence d’Alan, comme les nuages brumeux que chasse le tonnerre de l’artillerie, semblait recouvrir de nouveau cette malheureuse affaire d’un voile aussi épais que l’obscurité palpable de l’Égypte. Il ne fallut pour cela que le son de la voix de Me Tough, qui, deux jours après le départ d’Alan, fut admis à répondre au plaidoyer de son jeune confrère. Muni d’une voix sonore, ayant de forts poumons, une opiniâtreté imperturbable, et prenant une