Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/237

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d’avoir eu le malheur de venir en ces cantons, il y a quatre semaines à peu près.

— Oui, monsieur — nous — eh ! — savons, et sommes convaincus que — pouf ! — vous n’aimez pas à entendre les noms de certaines gens ; et que — eh ! — vous me comprenez bien, — il y a des choses, des sujets, des entretiens sur des noms, etc., etc., qui vous remuent un peu la bile — ce dont je ne suis pas d’humeur à être témoin. Cependant, M. Darsie — ou — pouf ! — M. Darsie Latimer — ou — pouf ! pouf ! eh ! — oui, M. Darsie sans le Latimer, — vous m’en avez aujourd’hui avoué bien assez pour me convaincre que vous êtes au mieux sous les soins très-honorables de mon ami que voilà, — d’après tons vos aveux, — outre que — pouf ! — eh ! — je le connais pour être une personne très-responsable et très-honorable : — pouvez-vous le nier ?

— Je ne sais rien sur lui, repris-je, pas même son nom ; et comme je vous l’ai déjà dit, je ne l’avais jamais vu depuis que je suis au monde, avant ces dernières semaines.

— Le jureriez-vous ? » dit l’homme singulier qui semblait attendre l’issue de ces débats, avec la même confiance que le serpent à sonnettes attend la proie qui a déjà senti sa fascination. Et tandis qu’il prononçait ces mots d’une voix forte mais creuse, il recula un peu sa chaise derrière celle du juge de paix, de manière à n’être vu ni du juge ni du clerc qui étaient assis du même côté, et il fronça les sourcils en me regardant d’une façon si effroyable, que personne, après avoir vu un pareil regard ne saurait l’oublier de sa vie. Les rides de son front devinrent livides et presque noires, et prirent en se contractant une forme demi-circulaire, ou plutôt elliptique, à la jonction des sourcils. J’avais entendu décrire un semblable regard dans une vieille histoire de revenants que le hasard voulait qu’on m’eût contée depuis peu, et dans laquelle cette contraction bizarre et terrible des muscles du front était assez bien décrite, comme formant l’image d’un petit fer à cheval.

Cette histoire, quand elle me fut contée, réveilla une horrible vision de mon enfance, que le regard hideux, alors fixé sur moi, rappela encore à mon souvenir, mais avec beaucoup plus de vivacité. Je fus même tellement surpris et, je dois dire, tellement épouvanté des idées vagues qui étaient réveillées dans mon esprit par ce signe effrayant, que je tins mes yeux attachés sur la figure où il se montrait, comme sur une apparition. Passant alors