Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/64

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Un chapeau à tenir sous le bras et une épée complétaient nécessairement son équipement qui, bien que hors de date, appartenait à un homme de qualité.

À l’instant où M. Crossbite finit ce qu’il avait à dire, ce personnage accosta mon père, en disant : « Votre serviteur, M. Fairford. — Il y a long-temps que nous ne nous sommes rencontrés. »

Mon père, dont vous connaissez la politesse scrupuleuse et formaliste, s’inclina, balbutia, demeura confus, et enfin dit au nouveau venu que l’époque depuis laquelle ils s’étaient vus était si éloignée, que, tout en se rappelant fort bien sa figure, son nom (il en était désolé) lui était sorti de la mémoire, il ne savait comment.

« Avez-vous donc oublié Herries de Birrenswork ? » reprit le monsieur. Mon père s’inclina plus bas encore qu’auparavant ; mais il me sembla que l’accueil qu’il faisait à son vieil ami, n’avait plus la même politesse respectueuse. Je trouvai qu’alors il y avait un peu de cette civilité de visage que le cœur eût refusé si le décorum l’avait permis.

Mon père, néanmoins, s’inclina encore une fois, et dit qu’il se flattait de le voir en bonne santé.

« Si bonne, mon cher M. Fairford, que je viens ici résolu à renouveler connaissance avec un ou deux vieux amis, et d’abord avec vous. — Je loge toujours à ma vieille auberge. — Il vous faut venir dîner aujourd’hui avec moi chez Paterson, au bout de Horse-Wynd : — C’est tout près de votre nouvelle demeure à la mode, et j’ai affaire à vous. »

Mon père s’excusa poliment et non sans embarras. — Une absolue nécessité le retenait chez lui.

« Alors je dînerai chez vous, mon cher, reprit M. Herries de Birrenswork. Le peu d’instants que vous pourrez m’accorder après dîner suffira à mon affaire ; et je ne vous empêcherai pas deux minutes de songer aux vôtres. — Je ne suis pas homme de bouteille. »

Vous avez souvent remarqué que mon père, quoique observateur scrupuleux des devoirs de l’hospitalité, semble les remplir plutôt comme une obligation que comme un plaisir ; et il est vrai que, sans un désir consciencieux de nourrir ceux qui ont faim et de recevoir les étrangers, il leur ouvrirait sa porte plus rarement qu’il n’a coutume de le faire. Je n’ai jamais vu un exemple plus frappant de cette singularité, qui, jusque-là, m’avait paru cari-