Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/70

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et trouvai le cheval et son maître immobiles comme une statue : l’animal haletant et ouvrant ses larges narines à la brise du matin, le cavalier les yeux fixés sur les faibles rayons du soleil levant, qui commençait déjà à colorer l’horizon du côté de l’est, et à dorer les montagnes éloignées du Cumberland et du Liddesdale.

Il paraissait plongé dans une rêverie dont il sortit à mon approche ; et, mettant son cheval en mouvement, il enfila une route malaisée et sablonneuse qui traversait de vastes dunes nues, unies et incultes, entrecoupées de marais, et fort semblables à celles que j’avais vues dans le voisinage de Shepherd’s Bush. Il est vrai que toute la campagne de cette contrée, dans la partie qui se rapproche de la mer, à l’exception de quelques endroits favorisés, présente le même air d’uniformité et de tristesse.

En nous éloignant d’une centaine de pas de l’entrée du vallon, nous pûmes apercevoir mieux encore le malheureux pays dont la vue était rendue plus pénible par le contraste des côtes opposées du Cumberland. Celles-ci étaient coupées et traversées par des milliers de lignes d’arbres croissant en haies, ombragées de bosquets et de bois d’une étendue considérable, animées par des villages et des maisons de campagne, d’où sortaient d’épais nuages de fumée donnant déjà signe de vie humaine et d’humaine industrie.

Mon conducteur avait étendu le bras, et me montrait la route de Shepherd’s Bush, quand nous entendîmes le pas d’un cheval qui approchait de nous. Il promena attentivement ses yeux autour de lui, et reconnaissant celui qui approchait, il continua de me donner ses instructions, en même temps qu’il se plaçait au beau milieu du chemin qui, à l’endroit où nous étions arrêtés, présentait d’un côté une fondrière et de l’autre un banc de sable.

Je remarquai que le nouveau venu ralentit l’allure de son cheval et lui fit quitter le petit trot pour le pas, comme s’il eût désiré nous laisser passer, ou du moins éviter de nous dépasser lui-même dans un endroit où les difficultés du chemin devaient nous amener fort près les uns des autres. Vous connaissez mon ancien faible, Alan, et vous savez que je suis toujours prêt à donner mon attention à la première chose venue, de préférence à l’individu qui m’adresse la parole.

Entraîné par cet aimable penchant, je m’occupais à rechercher en moi-même le motif qui semblait faire désirer au cavalier de se