Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/106

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

monarque toujours aussi bien intentionné et aussi pacifique qu’il l’a jamais été ; mais… des troupes bourguignonnes ont depuis peu marché sur le Sandgau, et des messages ont été envoyés à notre État parle comte Archibald d’Hagenbach. — En voilà assez, répliqua le landamman ; ne levez pas davantage le voile qui cache une faiblesse dont vous rougissez. Je vous comprends tout-à-fait. Bâle est située trop près de la citadelle de La Ferette pour qu’il soit permis aux Bâlois de consulter leurs propres inclinations. Confrère, nous voyons en quoi consiste votre embarras… nous avons pitié de vous, et nous vous pardonnons votre inhospitalité. — Mais voyons, écoutez-moi jusqu’au bout, digne landamman, reprit le magistrat. Il y a dans le voisinage d’ici un ancien rendez-vous de chasse des comtes de Falkenstein, appelé Graff’s-Lust[1], qui, quoique en ruines, peut encore vous fournir un meilleur logement que le plein air, et qui est susceptible de défense… À Dieu ne plaise pourtant que personne ose troubler votre repos ! Et maintenant, écoutez-moi encore, mes dignes amis… Si vous trouvez dans la vieille bicoque des rafraîchissements tels que vin, bière, etc., usez-en sans scrupule, car on les y aura portés pour vous. — Je ne refuse pas d’occuper une place de sûreté, dit le landamman ; car quoique la cause qui nous fait fermer les portes de Bâle puisse bien ne provenir que d’un esprit d’insolence bien vil et de bien petite méchanceté, il se peut aussi que cette détermination se lie à quelque projet de violence. Nous vous remercions de vos provisions, mais nous ne mangerons pas, de mon consentement du moins, aux dépens d’amis qui craignent de s’avouer tels autrement qu’en cachette. — Une chose encore, mon digne monsieur, reprit l’officier de Bâle : vous menez là, de compagnie avec vous, une jeune demoiselle qui, je pense, est votre fille. Il n’y a point, à l’endroit où vous allez, de logement bien commode même pour des hommes pour des femmes ce serait pire encore, quoique nous ayons fait tout ce que nous avons pu pour arranger les choses le mieux possible. Laissez donc plutôt votre fille s’en retourner avec nous à Bâle, où mon épouse lui servira de mère jusqu’à demain, et demain je la ramènerai saine et sauve à votre camp. Nous avons promis de fermer nos portes aux hommes de la confédération, mais les femmes n’ont pas été mentionnées. — Vous êtes de subtiles casuistes, vous autres gens de Bâle, répliqua le landamman ; mais sachez que, depuis l’époque où les Helvétiens s’élancèrent à la rencontre de César jusqu’à

  1. Le plaisir du comte. a. m.