Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/214

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dans les Alpes ; nous avons appris comment ils se sont révoltés contre l’empereur, et comment, à l’aide de positions fortes, d’embuscades et de cachettes, ils ont assassiné plusieurs chevaliers et gentilshommes envoyés contre eux par le duc d’Autriche ; mais nous ne concevons pas que de chétifs hameaux et de pauvres bandes de mutins aient eu l’insolence de s’intituler États libres, et de vouloir entrer en négociation comme tels avec un prince aussi puissant que Charles de Bourgogne. — N’en déplaise à Votre Excellence, » répliqua le landamman avec un calme parfait, vos propres lois de chevalerie déclarent que, si le plus fort insulte le plus faible, ou si le noble maltraite le vilain, ce seul fait efface toute distinction entre eux, et que l’auteur de l’injure est dès lors tenu à donner telle satisfaction que demande la partie outragée. — Regagne tes montagnes, manant ! « s’écria le hautain chevalier. « Vas-y peigner ta barbe, y rôtir tes châtaignes. Quoi ! parce que des rats et des souris en petit nombre ont trouvé asile dans les murs et les boiseries de nos habitations, devrons-nous pour cela leur permettre de nous régaler de leur dégoûtante présence, de se donner des airs de liberté et d’indépendance jusque sous nos yeux ? non pas ! nous les écraserons plutôt sous les talons de fer de nos bottes. — Nous ne sommes pas gens à nous laisser fouler aux pieds, » dit tranquillement Arnold Biederman ; « ceux qui l’ont déjà tenté ont rencontré en nous des pierres d’achoppement. Quittez donc pour un instant, seigneur chevalier, ce langage hautain, et écoutez des paroles de paix. Relâchez notre camarade, le marchand anglais Philipson, que vous avez illégalement arrêté ce matin ; permettez-lui de vous payer une somme raisonnable pour sa rançon ; et nous, qui nous rendons de ce pas à la cour du duc, nous lui ferons un rapport favorable sur son gouverneur de La Ferette. — Vous seriez assez généreux, vraiment ! » repartit sir Archibald d’un ton d’ironie. « Et quel gage aurai-je de la haute bienveillance que vous m’annoncez ? — La parole d’un homme qui n’a jamais manqué à sa promesse, » répondit le stoïque landamman.

« Insolent rustre ! répliqua le chevalier, oses-tu bien stipuler avec moi, m’offrir ta parole de paysan comme caution entre le duc de Bourgogne et Archibald d’Hagenbach ? Sache que vous n’irez pas en Bourgogne du tout, ou que ce sera avec les fers aux mains et la corde au cou… Holà ! ho ! Bourgogne à la rescousse ! »

À l’instant où il prononça ces mots, les soldats se montrèrent, devant, derrière, et autour de l’espace étroit où les Suisses s’étaient