Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/339

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— Vous dites bien, comte. Clarence a trahi son beau-frère ; Louis a empoisonné son frère… Les affections domestiques, bah ! elles peuvent bien se tenir chaudement au coin du feu d’un simple particulier, mais elles ne peuvent venir ni sur les champs de bataille ni dans les palais des princes où le vent souffle froid. Non, mon alliance avec Édouard par un mariage ne me sera pas d’un grand secours en cas de besoin. Je consentirais aussi volontiers à monter un cheval indompté sans meilleure bride qu’une jarretière ; mais que résultera-t-il ? Il fera la guerre avec Louis : quel que soit le vainqueur, moi que doit renforcer leur mutuelle faiblesse, j’en tirerai avantage… les Anglais tueront les Français avec leurs flèches d’une aune, et les Français par des escarmouches affaibliront, ruineront et détruiront les Anglais. Au printemps j’entrerai en campagne avec une armée supérieure aux leurs, et alors, saint George pour Bourgogne ! — Et si, en attendant, Votre Altesse daignait seconder, même le moins du monde, la cause la plus honorable pour laquelle chevalier mit jamais sa lance en arrêt… une faible somme d’argent et un corps peu nombreux de lances du Hainaut qui gagneraient et réputation et fortune à nous servir, peuvent remettre le malheureux héritier de Lancastre en possession des domaines qui lui appartiennent légalement par droit de naissance. — Oui vraiment, seigneur comte, dit le duc, vous en venez sans gêne à votre but ; mais nous avons vu et même secondé tant de variations de fortune entre York et Lancastre, que nous ne savons guère quel est le parti en faveur duquel le ciel s’est déclaré pour le droit, et le peuple pour le pouvoir effectif ; nous sommes vraiment étourdis à la vue de toutes les révolutions extraordinaires dont l’Angleterre a été le théâtre. — Preuve, monseigneur, que ces changements ne sont pas encore finis, et que votre généreuse assistance peut donner au meilleur parti un heureux retour de fortune. — Et prêter à ma cousine Marguerite d’Anjou mon bras pour détrôner le frère de ma femme ? Peut-être mérite-t-il peu de bienveillance de ma part, puisque lui et ses insolents nobles m’ont pressé avec des remontrances, et même avec des menaces, de laisser de côté toutes mes autres importantes affaires, et de me joindre à Édouard, Dieu me pardonne ! dans une expédition de chevalier errant contre Louis. Je marcherai contre lui à mon temps, pas plus tôt ; et par saint George ! ni roi ni noble d’outre-mer ne feront la loi à Charles de Bourgogne. Vous êtes des compères diablement fins, vous autres Anglais d’un parti comme de l’autre, qui pensez que les affai-