Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/473

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vantés pour l’effet de ce hardi langage. Mais il ne fut jamais possible de deviner au juste quelle impression ces paroles produisirent sur Charles. Il regarda autour de lui avec un sourire… « Entendez-vous ce jeune coq anglais, messieurs ? dit-il : sur quel ton chantera-t-il un jour, s’il ouvre déjà le bec si bravement en présence d’un prince ? »

Plusieurs cavaliers arrivèrent alors de différentes directions, annonçant que le duc Ferrand et sa compagnie étaient rentrés dans leur camp, et que le pays était absolument libre d’ennemis.

« Alors, rétrogradons aussi, répliqua Charles, puisqu’il n’y a pas chance de rompre des lances aujourd’hui. Et toi, Arthur de Vere, ne me quitte pas. »

Arrivé dans le pavillon du duc, Arthur subit un interrogatoire, et dans ses réponses ne parla ni d’Anne de Geierstein, ni des desseins de son père relativement à lui-même, car il pensa que Charles n’avait rien à faire là-dessus, mais il lui avoua franchement les menaces personnelles dont le comte s’était servi tout haut. Le duc l’écouta avec assez de calme, et quand il entendit cette phrase : « Qu’un homme qui n’attache plus aucun prix à sa propre vie tient celle des autres absolument en son pouvoir, » il répliqua : « Mais au delà de cette vie, il en est une autre où l’homme lâchement assassiné et l’infâme assassin recevront chacun suivant leurs œuvres. » Il tira alors de son sein une croix d’or, et la baisa avec une grande apparence de dévotion. « Voilà, ajouta-t-il, en quoi je placerai ma confiance. Si je succombe en ce monde, puissé-je trouver grâce dans l’autre. Holà ! sire maréchal, s’écria-t-il, amenez-nous vos prisonniers. »

Le maréchal de Bourgogne entra avec le comte d’Oxford, et déclara que son autre prisonnier, Campo-Basso, avait demandé avec tant d’instance qu’on le laissât aller relever des sentinelles sur cette partie du camp confiée à la garde de ses troupes, que lui, maréchal, avait jugé convenable de lui accorder cette permission.

« C’est bien, » dit Bourgogne sans plus ample remarque… « Quant à vous, comte d’Oxford, je vous présenterais votre fils, si vous ne l’aviez déjà serré dans vos bras ; il gagne grand lot et grand honneur, et m’a rendu un important service. Nous sommes à une époque de l’année où les gens de bien pardonnent à leurs ennemis… je ne sais pourquoi mon esprit fut toujours assez peu propre à se charger de pareilles affaires… mais j’éprouve le désir