Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/476

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de ses compagnons, lorsqu’ils arrivèrent à cette partie du camp qu’occupaient encore, la veille, Campo-Basso et ses Italiens qui, en comptant les gens d’armes et les stradiotes, montaient à environ deux mille hommes ! Pas un qui vive ne fut crié… pas un cheval ne hennit, pas un coursier n’était attaché aux nombreux piquets… pas de garde dans cette partie du camp. Ils examinèrent plusieurs tentes et huttes, et ils virent avec effroi qu’elles étaient vides.

« Retournons donner l’alarme au camp, dit le comte d’Oxford ; c’est une trahison. — Non, milord, répondit Colvin, n’allons pas raconter des nouvelles incomplètes. J’ai une batterie avancée à cent pas, laquelle défend l’accès de ces chemins creux ; voyons si mes canonniers allemands sont à leur poste, et je crois pouvoir jurer que nous les y trouverons. La batterie commande un sentier étroit par lequel il faut absolument passer pour approcher du camp, et si mes hommes sont à leur devoir, je gagerais ma vie que nous pouvons défendre le passage jusqu’à ce qu’une partie du corps principal vienne à notre secours. — En avant donc, au nom de Dieu ! » dit le comte d’Oxford.

Ils se précipitèrent au galop et à tout risque sur un terrain inégal rempli de verglas en certains endroits, et encombré de neige dans les autres. Ils arrivèrent à l’artillerie, habilement placée de manière à balayer le passage qui allait en montant jusqu’aux pièces, et au delà descendait en pente douce vers les retranchements. La pâle lueur d’une lune d’hiver, se mêlant aux premiers rayons du jour, leur montra que les canons étaient à leurs place, mais aucune sentinelle n’apparaissait.

« Les infâmes ne peuvent avoir déserté ! » dit Colvin tout surpris… mais voyons, on aperçoit de la lumière dans les tentes… Oh ! peste soit de cette distribution de vin ! ils se sont abandonnés à leur péché habituel d’ivrognerie. J’aurai bientôt mis fin à leurs réjouissances. »

Il sauta de cheval, et se précipita dans la tente d’où partait la lumière. Les canonniers, pour la plupart, y étaient encore, mais étendus à terre, leurs coupes et leurs flacons épars autour d’eux ; et leur ivresse était si complète, que Colvin put seulement, par ordre et par menaces, en réveiller deux ou trois, qui, chancelant et obéissant plutôt par instinct que par sentiment, allèrent garder la batterie. Un bruit lourd, semblable à celui d’hommes marchant très vite, se fit alors entendre vers le défilé.