Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/55

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vous devez savoir qu’en beaucoup d’occasions les forts sont sauvés par le secours des faibles, les superbes par l’aide des humbles. — J’ai du moins appris, répliqua l’Anglais, à ne discuter aucun point sans nécessité avec l’hôte qui m’a cordialement ouvert sa porte. » Après avoir lancé à son fils un regard où semblait briller la plus vive affection, il reprit, tandis qu’ils retournaient tous ensemble à la maison, un entretien qu’il avait commencé avec sa nouvelle connaissance, avant qu’Arthur et la jeune fille les eussent rejoints.

Arthur put, pendant ce temps-là, observer la figure et les traits de leur hôte helvétien, qui, nous l’avons déjà remarqué, annonçaient une simplicité primitive mêlée à une certaine dignité sauvage, produite par une physionomie mâle et sans aucune affectation. Ses vêtements ne différaient pas beaucoup pour la forme du costume de femme que nous avons décrit. Ils consistaient en un fourreau de dessus, taillé comme la chemise moderne, ouvert seulement sur la poitrine, et porté sur une tunique ou pourpoint. Mais l’habillement de l’homme était beaucoup plus court, en ce que les pans ne descendaient guère plus bas que la jaquette des montagnards écossais ; des espèces de bottes ou brodequins montaient au dessus des genoux, et le corps entier se trouvait ainsi couvert. Un bonnet, fait de fourrure de martre, et garni d’un médaillon d’argent, était la seule partie du costume qui déployât quelque richesse ; la large ceinture qui retenait le vêtement était en buffle, et serrée par une grande boucle de cuivre.

Mais la figure de l’homme qui portait ce costume grossier, composé presque entièrement de la toison des brebis de la montagne et des dépouilles d’animaux qu’on tue à la chasse, aurait commandé le respect partout où il se serait présenté, surtout à cette époque guerrière où l’on jugeait les gens selon que leurs nerfs et leurs muscles annonçaient plus ou moins de vigueur. Pour ceux qui envisageaient Arnold de Biederman sous ce point de vue, il déployait la taille et les formes, les larges épaules et les muscles proéminents d’un Hercule. Mais lorsqu’on examinait plutôt sa physionomie, ses traits fins et spirituels, son large front, ses grands yeux bleus, et l’air de résolution qu’ils annonçaient, lui donnaient encore plus de ressemblance avec le fabuleux roi des dieux et des hommes. Il était accompagné de plusieurs fils et parents, jeunes hommes au milieu desquels il marchait, recevant comme chose à lui incontestablement due, un respect et une obéissance semblables à ceux qu’on voit rendre au cerf-roi par un troupeau de daims.