Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/114

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questions qui pourraient lui être adressées par son jeune ami.

« À présent, dit le chevalier, vous savez, père, que les étrangers qui voyagent dans ce pays doivent être les premiers objets de nos soupçons et de nos recherches. Quelle est, par exemple, votre opinion sur le jeune homme appelé Augustin, fils, ou se disant tel, d’un individu nommé Bertram le ménestrel, et demeurant depuis quelques jours dans votre couvent ? »

L’abbé entendit cette question avec des yeux qui exprimaient sa surprise de l’entendre sortir de la bouche de sir Aymer.

« En vérité, répondit-il, je pense que c’est un jeune homme qui, autant que je puis le connaître, possède un naturel excellent, beaucoup de loyauté et une grande religion, enfin tout ce à quoi je devais m’attendre, à en juger par l’estimable personnage qui l’a confié à mes soins. »

Après cette réponse, l’abbé salua le chevalier, comme s’il eût pensé qu’une pareille repartie lui donnait un grand avantage sur son adversaire et réduisait celui-ci au silence pour toutes les questions qu’il aurait pu lui faire sur le même sujet. Il fut probablement fort étonné quand sir Aymer répliqua de la manière suivante :

« Il est bien vrai, père abbé : c’est moi-même qui vous ai recommandé ce bambin comme un jeune homme d’un caractère inoffensif, et à l’égard duquel il ne serait pas nécessaire d’employer la vigilance sévère parfois requise en pareille circonstance ; mais les preuves qui me paraissent démontrer l’innocence de ce jeune garçon n’ont pas semblé satisfaisantes à mon supérieur et à mon commandant ; et c’est par son ordre que je viens ici vous interroger. Vous devez comprendre qu’il s’agit d’une importante affaire, puisque nous venons vous troubler encore une fois et à une heure si indue.

— Je puis seulement protester de mon innocence, et par mon ordre et par le voile de sainte Brigitte, répliqua l’abbé (l’esprit de Celse paraissant se retirer de son disciple) : quelque mal qu’il puisse y avoir dans cette affaire, j’ignore absolument tout ; on ne pourrait rien m’arracher par les tenailles et les autres instruments de torture. Quelque signe de déloyauté qu’ait pu manifester ce jeune homme, je n’ai rien aperçu, moi, bien que j’aie sévèrement examiné sa conduite. — Sous quel rapport ? et quel est le résultat de vos observations ? — Ma réponse sera sincère et franche. Le jeune homme a consenti au dépôt d’un certain nombre de couronnes d’or, nullement pour payer l’hospitalité de l’église de Sainte-