Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/153

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mander à un malheureux qui tombe dans un précipice de songer avec calme à quelle branche il fera bien de s’accrocher pour amortir sa chute. Nécessairement il s’attachera à celle qu’il pourra le plus aisément saisir, et il abandonnera le reste à la volonté de la Providence. J’accepte donc la protection que vous m’offrez, avec les restrictions qu’il vous plaît d’y mettre, et je place toute ma confiance dans le ciel et dans vous. Pour me servir efficacement, néanmoins, il faut que vous connaissiez mon nom et ma position. — J’en ai déjà été instruit par celle qui vous accompagnait tout-à-l’heure. Ne pensez pas, jeune dame, que beauté, rang, vastes domaines, immenses richesses, talents accomplis puissent avoir la moindre valeur aux yeux de celui qui porte la livrée de la tombe, et dont les affections et les désirs sont depuis long-temps ensevelis dans le sépulcre. — Puisse votre foi être aussi ferme que vos paroles semblent sévères ! et je m’abandonne à vous sans le moindre doute, sans la moindre crainte d’avoir mis à tort toute ma confiance en vous ! »


CHAPITRE XV.

LA ROUTE.


Lady Augusta se voyait traitée avec une rigueur propre à lui faire sentir la nécessité de l’obéissance la plus complète aux volontés du chevalier de la Tombe, en qui elle s’était imaginé voir tout d’abord un des principaux adhérents de Douglas, sinon James Douglas lui-même. Et pourtant, l’idée qu’elle s’était faite du redoutable Douglas était celle d’un chevalier s’acquittant avec exactitude des devoirs de sa noble profession, particulièrement dévoué au service du beau sexe, en un mot tout-à-fait différent du personnage auquel elle se trouvait si étrangement unie, comme par suite d’un enchantement. Néanmoins, lorsque, comme pour abréger l’entretien, il se précipita subitement dans un des labyrinthes du bois, en adoptant un pas que, vu la nature du terrain, le cheval de lady Augusta eut quelque peine à prendre, elle le suivit avec l’anxiété et la vitesse d’un jeune épagneul qui, par crainte plutôt que par amitié, s’efforce de marcher sur les traces d’un maître sévère. La comparaison, il est vrai, n’est ni polie ni très convenable à une époque où les femmes étaient adorées avec une espèce de dévotion ; mais des circonstances telles que celles-ci étaient rares, et lady