Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/156

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et lui enverrai ma lettre par un messager spécial que vous-même accompagnerez ; il répondra sans doute promptement, et vous pourrez reconnaître que celui-là même qui jusqu’à présent a paru sourd aux prières et insensible aux affections terrestres, a encore quelque sympathie pour la beauté et la vertu. Je remettrai le soin de votre sûreté et de votre bonheur futur en votre propre pouvoir et en celui de l’homme que vous avez adopté, et vous serez libre de choisir entre ce bonheur et la misère. »

Comme il parlait ainsi, un de ces ravins, une de ces fentes qui coupaient le terrain sembla s’ouvrir devant eux ; et le chevalier-spectre y dirigea ses pas avec une attention qu’il n’avait pas encore montrée, prit par la bride le palefroi de la dame pour lui faciliter la descente du sentier rapide et raboteux qui seul rendait accessible le fond de cette noire vallée.

Lorsqu’elle arriva enfin sur un sol uni, après les dangers d’une descente dans laquelle son palefroi semblait être soutenu par la force et l’adresse de l’être singulier qui le tenait par la bride, la dame regarda avec quelque étonnement un lieu si propre à servir de retraite. Et il fut d’autant plus évident qu’il en servait en effet, qu’on répondit de différents côtés à un son de cor très bas que donna le chevalier de la Tombe ; et, lorsque le même son fut répété, une dizaine d’hommes armés, les uns portant l’uniforme de soldats, d’autres habillés en bergers et en laboureurs, parurent successivement comme pour montrer qu’ils avaient entendu l’appel.


CHAPITRE XVI.

TURNBULL.


« Bonjour, mes braves amis ! » dit le chevalier de la Tombe à ses compagnons qui semblèrent l’accueillir avec l’empressement d’hommes engagés dans la même entreprise périlleuse. « L’hiver est passé ; le dimanche des Rameaux est arrivé ; et, s’il est sûr que la glace et la neige ne continueront pas d’engourdir la terre pendant le prochain été, il ne l’est pas moins que nous tiendrons parole à ces fanfarons d’Anglais, qui s’imaginent que leurs vanteries et leurs malicieux discours peuvent quelque chose sur des cœurs écossais. Tant que nous trouverons convenable de rester cachés, ils tâcheraient aussi vainement de nous découvrir qu’une ménagère chercherait inutilement une aiguille qu’elle aurait laissé tomber parmi les feuilles flétries de ce chêne gigantesque. Encore quelques