Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/229

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nes à rien, si ce n’est à guérir de loin en loin l’enfant de quelque pauvre qui avait les écrouelles, et ne pouvait se procurer pour un sou de sels. Mais milady Pénélope Penfeather a été atteinte d’une maladie que personne, à ce qu’il paraît, n’avait eue avant elle, et ainsi il fallait qu’elle fût guérie comme personne ne l’avait jamais été : rien de plus juste ! Or milady, comme vous savez, a de l’esprit à volonté ; elle a tous les savants d’Édimbourg à sa maison de Windyway là-bas, que le bon plaisir de milady est d’appeler Air-Castle[1] ; et ils ont tous leurs différentes manières : les uns savent faire des vers et des contes aussi bien que Robert Burns ou Allan Ramsay[2] ; les autres courent sur les montagnes ou dans les vallées, réduisant les pierres en éclats avec des marteaux, comme les gens qui sont occupés à arranger les routes… On dit que c’est pour voir comment le monde a été fait. Quelques uns jouent de toute espèce d’instruments à plusieurs cordes… Il y en a d’autres qui dessinent, et que vous pouvez voir perchés comme des corneilles sur la cime de chaque rocher du pays, travaillant au même métier que vous, monsieur Francis : de plus, des hommes qui ont été dans les pays étrangers, ou disent qu’ils y ont été, ce qui est tout un, vous savez ; et peut-être deux ou trois demoiselles avec le bas de leurs robes crotté, qui s’emparent de ses folies lorsqu’elle n’en a plus que faire, comme ses femmes de chambre des bardes qu’elle a portées. Ainsi, après son heureuse guérison, comme ils l’appellent, toute cette bande d’oies sauvages vint s’abattre et s’établir près des eaux pour y dîner sur la terre, comme des chaudronniers de campagne ; et là ils chantèrent et firent de la musique, et portèrent des santés, sans doute en l’honneur de la fontaine, comme ils appellent cette vilaine mare, et de lady Pénélope Penfeather ; et enfin ils terminèrent solennellement en buvant tous une rasade d’eau de la source, spécifique qui, comme je l’ai appris, fit un fier ravage parmi eux durant la route pour retourner chez milady. Ils appelaient cela un pique-nique ; la peste soit d’eux ! Et ainsi la danse commença au son du violon de lady Pénélope, et plus d’un faux pas a été fait depuis lors ; car bientôt arrivèrent des maçons et des farceurs, des prédicateurs, des comédiens, des épiscopaux, des méthodistes, des fous, des joueurs de violon, des papistes, des pâtissiers, des docteurs et des droguistes ; sans compter les boutiquiers

  1. Windywa, écossisme, signifiant demeure venteuse ; et Air-Castle, château d’air, c’est-à-dire aéré. a. m.
  2. Deux poètes écossais. a. m.