Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/307

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drait mieux ; cependant ce sera comme vous voudrez. Mais votre pareil n’est jamais entré par ma porte. »

Le voyageur était sorti avant qu’elle eût achevé sa phrase ; et laissant Meg se démener et grogner à loisir, il s’en alla, avec la précipitation qui caractérisait tous ses mouvements lorsqu’il avait un nouveau projet en tête, lier connaissance avec le ministre de Saint-Ronan ; pendant qu’il descend la rue qui mène à la mense, nous allons présenter au lecteur ce nouveau personnage.

Le révérend Josiah Cargill était fils d’un petit fermier du sud de l’Écosse ; une faible constitution jointe à ce penchant pour l’étude qui accompagne souvent une santé débile, décida ses parents, au risque de quelque sacrifice, à l’élever pour l’église. Ils étaient d’autant plus portés à se soumettre aux privations nécessaires pour subvenir à cette dépense, que, par suite de certaines traditions de famille, ils s’imaginaient qu’il avait dans les veines quelques gouttes du sang de ce fameux Boanerges du Covenant, Donald Cargill, qui fut égorgé par ses persécuteurs dans la ville de Queenferry, pendant la triste époque de Charles II, uniquement pour avoir, dans la plénitude de sa puissance sacerdotale, rejeté de l’Église et livré à Satan, par une excommunication formelle, le roi et la famille royale, avec tous les ministres et courtisans qui leur étaient attachés. Mais si Josiah descendait réellement de cet intraitable champion, la chaleur de l’esprit de famille dont il aurait dû hériter était tempérée par la douceur de son naturel et par le caractère pacifique des temps au milieu desquels il avait le bonheur de vivre. Il était représenté, par tous ceux qui le connaissaient, comme doux, paisible, studieux, fou de science ; comme un homme qui poursuivait tranquillement le but unique d’acquérir de nouvelles connaissances, celles surtout qui avaient rapport à sa profession, et qui montrait la plus complète indulgence pour ceux dont les goûts différaient des siens. Ses seules récréations, dignes d’un caractère paisible, doux et pensif, se bornaient à des promenades presque toujours solitaires dans les bois et les montagnes, à la louange desquels il se rendait parfois coupable d’un sonnet, mais simplement parce qu’il ne pouvait maîtriser son enthousiasme, et non pour acquérir la renommée et les récompenses qui sont le partage d’un poète heureux. Même, au lieu de chercher à glisser ses pièces fugitives dans les revues et les journaux, il rougissait, lorsqu’il était seul, de ses essais poétiques, et de fait il lui arrivait