Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/368

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pétueusement dans la chambre. « Depuis que le démon lui-même, continua-t-il, a troublé le bonheur de la parfaite innocence, il n’y eut jamais un pareil acte de perfidie… Jamais pareil projet de félicité ne fut détruit… jamais misère si inévitable ne fut préparée à deux malheureux qui avaient eu la sottise de placer toute confiance en leur persécuteur… s’il y avait eu de la passion dans sa conduite, ç’aurait été l’acte d’un homme pervers, il est vrai, mais encore d’une créature humaine, agissant sous l’influence d’humaines passions… mais ce fut l’œuvre d’un démon poussé par les plus sordides motifs d’intérêt privé, et par une haine ancienne et invétérée contre un frère dont il croyait les droits préjudiciables aux siens. — Je suis fâché de vous voir dans une semblable agitation, » dit le capitaine avec calme ; « lord Étherinoton a, j’en suis certain, agi d’après des motifs différents de ceux que vous lui imputez ; et si vous consentiez seulement à m’entendre, peut-être surgirait-il un moyen d’arranger ces déplorables querelles. — Monsieur, » répliqua Tyrrel se rasseyant, « je vous écouterai avec calme, avec autant de sang-froid que j’en montrerais si un médecin sondait dans mes entrailles même une douloureuse blessure ; mais quand vous me touchez au vif, quand vous attaquez jusqu’au nerf, vous ne pouvez attendre que je l’endure sans me plaindre. — Je m’efforcerai donc d’être aussi expéditif que possible dans l’opération, » dit Jekill, qui conserva un admirable sang-froid pendant la conférence. « Je pense, monsieur Tyrrel, que la paix, la félicité et l’honneur de miss Mowbray vous sont chers. — Qui ose attaquer son honneur ? » répliqua Tyrrel avec fierté ; puis se maîtrisant, il ajouta d’un ton plus tranquille, mais profondément ému : « Tout cela m’est aussi cher, monsieur, que la lumière du jour. — Les sentiments de mon ami, à cet égard, sont absolument les mêmes, et il a résolu de rendre à miss Clara la plus complète justice. — Il ne peut lui rendre justice qu’en cessant de demeurer dans son voisinage, de s’occuper, de parler, même de rêver d’elle. — Lord Étherington pense autrement ; il croit que si miss Mowbray a été offensée par lui, cette offense sera suffisamment réparée par l’offre de son titre, de son rang et de sa fortune. — Son titre, son rang, sa fortune, monsieur, sont aussi faux que lui-même, » dit Tyrrel avec violence… « Lui, épouser Clara Mowbray ! jamais ! — La fortune de mon ami, vous y réfléchirez, ne dépend pas entièrement de l’issue du procès dont vous le menacez… Dépouillez-le, si vous pouvez, du domaine d’Oakendale, il a encore un patrimoine considérable par sa mère. Et d’ail-