Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/37

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quels les prétentions de Bruce et de Baliol ont été courageusement disputées, et vous me permettrez de dire que, si les Écossais n’ont pas eu la bonne cause de leur côté, ils ont du moins défendu la mauvaise de tous leurs efforts et en hommes aussi braves que fidèles. — Quant à la bravoure, je vous l’accorde, répondit le chevalier, car je n’ai jamais vu de lâches parmi eux ; mais pour ce qui est de la fidélité, j’en fais juge quiconque sait combien de fois ils ont juré soumission à l’Angleterre, et combien de fois aussi ils ont manqué à leur parole. — Je ne veux pas compliquer la question, répliqua le ménestrel ; c’est pourquoi je laisserai Votre Seigneurie déterminer quel est le plus coupable, de celui qui force le faible à prêter un serment injuste, ou de celui qui, contraint par la nécessité, prête le serment qu’on lui impose, sans l’intention de le tenir. — Laissons cela, dit Valence, gardons chacun notre opinion : il n’est pas probable que l’un ou l’autre nous renoncions à notre manière de voir. Mais suis mon conseil : tant que tu voyageras sous une bannière anglaise, songe à ne tenir une pareille conversation ni dans la grande salle, ni dans la cuisine : le soldat pourrait être moins endurant que l’officier ; et maintenant, je te prie, voyons ta légende du Château dangereux. — Il me semble, répliqua Bertram, que Votre Seigneurie pourra aisément en trouver une édition meilleure que la mienne, car je ne suis point venu dans ce pays depuis plusieurs années ; mais il ne me sied pas de discuter avec un chevalier tel que vous. Je vais vous conter la légende telle qu’on me l’a dite. Je n’ai pas besoin, je pense, de rappeler à votre seigneurie que les lords de Douglas, qui ont bâti ce château, ne le cèdent à aucune famille d’Écosse pour l’ancienneté de leur race ; ils prétendent même que leurs ancêtres ne sont comptés, comme ceux des autres grandes familles, que du moment où ils se sont distingués par un certain degré d’illustration. « Vous pouvez nous voir en arbre, disent-ils, vous ne pouvez nous découvrir en simple rejeton. Vous pouvez nous voir déjà fleuve, et vous ne sauriez remonter à la source. » En un mot, ils nient que les historiens ou les généalogistes puissent désigner l’homme sans illustration, appelé Douglas, qui fut la souche première de leur famille ; et au fait, si reculée que soit l’époque à laquelle nous reprenons cette race, nous la voyons toujours se distinguer par le courage et les hautes entreprises, ainsi que par la puissance qui en assure le succès. — Il suffit, dit le chevalier, j’ai ouï parler de l’orgueil et de la puissance de cette grande famille, et je n’ai pas le moindre intérêt à nier ou à combattre leurs vastes pré-