Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/370

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m’explique clairement pourquoi votre ami, M. Valentin Bulmer, n’a point commencé ses machinations plus tôt, et pourquoi il les commence à présent. Il se croit certain qu’Hannah Irwin n’est plus dans la Grande-Bretagne, ou qu’on ne peut la faire comparaître devant un tribunal… mais il peut se tromper. — Mon ami semble plein de confiance dans la bonté de sa cause ; mais, par égard pour la jeune dame, il n’est guère disposé à entamer un procès qui doit rendre publiques une foule de circonstances pénibles. — Remerciez-en le traître qui a chargé une mine si terrible, et qui maintenant affecte de la répugnance à mettre le feu… Oh ! combien ne faut-il pas que je maudisse cette parenté qui me lie les mains ! Je me résignerais à devenir le dernier et le plus misérable des hommes pour une heure de vengeance contre cet hypocrite sans pareil… Il est une chose certaine, monsieur… votre ami n’aura point une victime vivante. Sa persécution tuera Clara Mowbray : il comblera la mesure de ses crimes par l’assassinat de la plus douce… Je ne puis continuer sur ce sujet. — Mon ami désire, autant que vous, épargner d’amers chagrins à la jeune dame ; et dans cette vue, pour ne plus revenir sur le passé, il a fait à M. Mowbray une proposition d’alliance qui a été hautement approuvée. — Ah ! » dit Tyrrel en tressaillant, « et la jeune personne ? — La jeune personne s’y est montrée tellement favorable, qu’elle a permis à lord Étherington de venir la visiter au château de Shaws. — Le consentement doit lui avoir été arraché de force. — Elle l’a donné volontairement, selon ce que j’ai pu comprendre ; à moins peut-être que le désir seul de jeter un voile sur ces tristes démêlés ne l’ait déterminée à accepter la main de lord Étherington. Je le vois, monsieur, je vous fais de la peine, et j’en suis fâché. Je n’ai aucun droit de vous engager à faire un effort de générosité ; mais si tels étaient cependant les sentiments de miss Mowbray, on devrait s’attendre à ce que vous ne compromissiez pas l’honneur de la jeune dame en insistant sur d’anciennes prétentions, et en obligeant de revenir sur des faits déjà oubliés. — Capitaine Jekill, » dit Tyrrel solennellement, « je n’ai aucune prétention. Toutes celles que je pouvais avoir ont été détruites par l’acte de trahison au moyen duquel votre ami est parvenu à me supplanter. Clara Mowbray fût-elle dégagée des nœuds de son prétendu mariage aussi complètement que les lois peuvent le faire, encore existerait-il entre elle et moi une barrière insurmontable, savoir la bénédiction nuptiale prononcée sur elle et sur l’homme qu’il faut que j’appelle encore une fois mon frère… » Il