Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/57

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aide un écuyer trop jeune : c’est un mal que nous réparerons. »

« Corbleu ! que le diable t’emporte, vieille chenille ! » se dit le page en lui-même ; « je te prends sur le fait cette fois, me calomniant moi et mon maître comme il est dans ta nature de calomnier tous les jeunes aspirants à la chevalerie. Si ce n’était souiller mes armes d’élève-chevalier, je pourrais t’honorer d’une invitation à me suivre en champ clos, tandis que les médisances que tu viens de débiter sont encore au bout de ta langue. Quoi qu’il en soit, tu ne tiendras pas publiquement tel langage dans le château, et puis tel autre en secret avec le gouverneur, sous prétexte que tu as servi avec lui sous la bannière de Longues-Jambes[1]. Je redirai à mon maître les bonnes intentions dont tu es animé pour lui ; et quand nous nous serons concertés ensemble, on verra si ce sont les jeunes courages ou les barbes grises qui doivent être l’espérance et la protection de ce château de Douglas. »

Il suffira de dire que Fabian exécuta ce dessein en rapportant à son maître, et de fort mauvaise humeur, la conversation qui avait eu lieu entre sir John de Walton et le vieux soldat. Il réussit à faire envisager l’incident comme une offense formelle faite à sir Aymer de Valence, de sorte que tous les efforts du gouverneur pour dissiper les soupçons conçus par le jeune chevalier ne purent réussir à lui persuader que son commandant avait à son égard d’excellentes intentions. Il conserva l’impression qu’avait produite sur son esprit le rapport de Fabian, et crut ne point faire injustice à sir John de Walton en supposant qu’il désirait s’appliquer la plus grande partie de la gloire acquise dans la défense du château, et qu’il éloignait à dessein ceux de ses compagnons qui pouvaient raisonnablement prétendre à leur bonne part d’honneur.

La mère de la Discorde, dit un proverbe écossais, n’est pas plus grosse qu’une aile de moucheron. Dans la querelle dont il s’agit, le jeune homme et le vieux chevalier ne s’étaient ni l’un ni l’autre donné un juste motif d’éloignement. De Walton était observateur rigide de la discipline militaire, dans laquelle il avait été élevé dès son extrême jeunesse, et qui le dirigeait presque aussi absolument que son caractère naturel ; en outre, sa situation présente renforçait son éducation première.

D’une autre part, la rumeur publique avait exagéré les talents militaires, l’esprit entreprenant et le génie artificieux de James, le jeune seigneur de Douglas. Il possédait, aux yeux de cette garni-

  1. Surnom d’Édouard Ier. a. m.