Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/251

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme j’espère pouvoir le prouver, confia son secret à une sœur, plus âgée de quelques années, et issue, à ce qu’il paraît, d’un premier mariage, et qu’elle la consulta sur les embarras et les dangers de sa malheureuse position. — Si en effet vous pouvez établir ce point, monsieur Fairbrother… dit le président. — Oui, milord, reprit M. Fairbrother, si je puis établir ce point, je me flatte non seulement de sauver ma cliente, mais encore d’épargner à Vos Seigneuries l’obligation la plus pénible de l’honorable emploi qui leur est confié, et procurer à tous ceux qui m’entendent maintenant la douce satisfaction de voir une créature aussi jeune, aussi belle, aussi ingénue que celle qui est maintenant présente à la barre, honorablement acquittée d’une aussi odieuse accusation. »

Cet appel sembla produire une vive impression sur la plus grande partie de l’auditoire, et fut suivi d’un léger murmure d’approbation. Deans, en entendant appuyer sur la beauté et l’air ingénu de sa fille, fut involontairement sur le point de tourner les yeux vers elle ; mais, revenant à lui-même, il les reporta de nouveau sur la terre avec la même obstination.

« Mon illustre confrère qui siège du côté opposé de la barre, » reprit l’avocat après un moment de pause, « partagera sans doute la satisfaction générale, puisqu’en remplissant le devoir qui lui prescrit de poursuivre un accusé, on sait que personne ne se réjouit plus sincèrement que lui de le voir honorablement acquitté. Mais je vois que mon illustre confrère secoue la tête d’un air de doute, en portant la main sur la déclaration d’Euphémie. Je le comprends parfaitement : il veut dire que les faits que je viens d’exposer ne sont nullement d’accord avec la déclaration d’Euphémie Deans elle-même. Je n’ai pas besoin de rappeler à Vos Seigneuries qu’il n’y a pas de loi qui oblige sa défense présentée être renfermée dans les limites de ses premiers aveux, et que ce n’est pas d’après ces aveux mêmes, mais d’après ce qui sera prouvé pour ou contre elle, qu’elle doit être finalement absoute ou condamnée. Je ne suis pas obligé d’expliquer pourquoi elle a jugé convenable d’omettre dans sa déclaration la confidence qu’elle a faite à sa sœur : elle pouvait n’en pas connaître l’importance ; elle pouvait craindre de compromettre sa sœur ; elle pouvait même l’avoir oubliée entièrement dans le premier moment de terreur et d’effroi qu’a dû éprouver une fille si jeune en se voyant arrêter pour un crime si odieux. La moindre de ces raisons pourrait suf-