Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/133

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garni d’une longue rangée de niches, dans chacune desquelles grimaçait l’image de quelque saint saxon, dont le nom barbare se trouvait à peine dans le calendrier romain.

Le même officier qui avait apporté à Éveline l’invitation de sa maîtresse, s’avança, à ce qu’elle supposa, pour l’aider à descendre de son palefroi ; mais c’était pour le conduire par la bride jusque dans le vestibule et sur une petite plate-forme élevée, où elle eut enfin la liberté de mettre pied à terre. Deux matrones d’un âge avancé, et quatre jeunes femmes de bonne famille, élevées par la générosité d’Ermengarde, vinrent respectueusement à la rencontre de sa parente. Éveline aurait bien voulu leur demander des nouvelles de sa tante ; mais les matrones posèrent leur doigt sur leurs lèvres ; geste qui, joint à la singularité de sa réception, excita encore plus la curiosité qu’elle éprouvait de voir sa respectable parente.

Elle fut bientôt satisfaite ; car une porte à deux battants s’étant ouverte non loin de la plate-forme où elle se trouvait, on la fit entrer dans un grand appartement fort bas et tendu de tapisseries, à l’extrémité duquel était assise la vieille dame de Baldringham. Quatre-vingts hivers n’avaient pas éteint l’éclat de ses yeux, ni fait courber d’un pouce sa taille imposante ; ses cheveux gris étaient encore assez épais pour former sur sa tête une espèce de couronne entremêlée d’une guirlande de feuilles de lierre ; sa longue robe brune tombait en larges plis autour d’elle, et la ceinture brodée qui l’assujettissait autour de sa taille était attachée par une boucle d’or incrustée de pierres précieuses qui valaient au moins la rançon d’un comte. Ses traits, qui avaient été beaux autrefois, ou plutôt imposants, quoique flétris et ridés, conservaient encore une majesté triste et sévère qui était en harmonie avec sa personne et ses vêtements. Elle avait à la main une baguette d’ébène ; à ses pieds reposait un vieux chien loup, qui dressa les oreilles et hérissa son poil lorsqu’il entendit un pas étranger s’approcher du fauteuil de sa maîtresse, chose rare dans cette maison.

« Paix ! Thrymel dit la vénérable dame ; et toi, fille de la maison de Baldringham, approche et ne crains pas mon vieux serviteur. »

Pendant que sa maîtresse parlait, le chien avait repris sa première posture, et, sans le feu rougeâtre dont ses yeux étincelaient, on aurait pu le prendre pour quelque emblème hiéroglyphique couché aux pieds d’une vieille prêtresse de Wodem ou de