Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/57

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CHAPITRE VI.

LE JUGE DE PAIX.


Le juge de paix est prés de là, avec son gros ventre garni d’un bon chapon, avec ses yeux sévères, et sa barbe coupée d’une manière affectée, plein de vues sages et de paroles modernes, et il joue ainsi son rôle.
Shakspeare.


Lorsque mistriss Bertram d’Ellangowan fut en état d’apprendre les nouvelles de ce qui s’était passé pendant qu’elle était restée à sa chambre, les commères ne parlèrent plus dans son appartement que du jeune et bel étudiant d’Oxford, qui avait, en consultant les astres, tiré l’horoscope du jeune laird, et béni sa jolie figure. La tournure, l’accent, les gestes de l’étranger furent détaillés. Son cheval, sa bride, sa selle, ses étriers furent minutieusement décrits. Tout cela fit une grande impression sur l’esprit de mistriss Bertram, car la bonne dame n’était pas mal partagée du côté de la superstition.

Sa première occupation, lorsqu’elle put travailler, fut de faire un petit sac de velours pour le thème de nativité, qu’elle avait obtenu de son mari. Ses doigts lui démangeaient de briser le cachet, mais la crédulité l’emporta sur la curiosité, et elle eut le courage de l’enfermer, dans toute son intégrité, entre deux feuilles de parchemin qu’elle cousit à l’entour pour empêcher qu’il ne fût froissé. Le tout fut placé dans un sac de velours et suspendu comme un charme au cou de l’enfant, et sa mère résolut de l’y laisser jusqu’au moment où elle pourrait satisfaire sa curiosité sans avoir rien à craindre. Le père, pour sa part, voulut s’acquitter de ses devoirs envers son fils, en lui donnant une bonne éducation ; et dans l’intention de la commencer aussitôt les premières années de raison, il engagea facilement Dominie Sampson à renoncer à sa profession publique de maître d’école de la paroisse pour se fixer à la Place, et, pour une somme qui n’égalait pas tout-à-fait les gages d’un laquais même à cette époque, d’entreprendre de communiquer au futur laird d’Ellangowan toute l’instruction qu’il possédait, et toutes les grâces et les perfections que certainement il n’avait pas, mais qu’il n’avait jamais découvert lui manquer. Le laird lui-même trouva son avantage particulier dans cet arrangement, il s’assurait un auditeur patient auquel il racontait ses histoires lorsqu’ils