Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/238

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cupe de son pansement, c’est juste ; mais qui accommodera ma perruque ? Allons, pour aujourd’hui, ajouta le vieux garçon en se regardant dans la glace, il faudra que Jenny essaie de la rendre présentable… et maintenant mettons-nous à déjeuner comme nous pourrons. Ce serait bien le cas de dire à Hector ce que sir Isaac Newton dit à son chien Diamant (je déteste ces animaux-là !), lorsqu’il eut renversé une bougie allumée sur des calculs qui occupaient le philosophe depuis vingt ans, et qu’il les eut réduits en cendre : « Diamant, Diamant, tu ne te doutes guères du mal que tu as fait ! »

— Je vous assure, monsieur, répondit sa nièce, que mon frère regrette l’emportement de sa conduite, et reconnaît que M. Lovel s’est très bien comporté.

— Cela raccommode bien les choses, après que le pauvre garçon s’est vu obligé de fuir le pays. Je vous dis, Marie, que ce n’est pas à la portée de l’intelligence d’Hector, et à plus forte raison de celle d’une femelle, de comprendre toute l’étendue de la perte qu’il a occasionnée à notre siècle et à la postérité… Aureum quidem opus[1]. Un poème sur un si beau sujet, avec des notes relatives tant aux passages obscurs qu’aux passages qui ne le sont pas ; même à ceux qui n’étant ni clairs ni obscurs, flottent encore dans le crépuscule douteux des antiquités calédoniennes ! J’aurais donné de la tablature aux panégyristes celtes par mes recherches. Fingal, comme ils se sont imaginé d’appeler Fin-Mac-Coul, s’enveloppant de nouveau dans son nuage, aurait disparu comme l’esprit de Loda… Un homme déjà vieux et dont les cheveux blanchissent peut-il jamais espérer de retrouver une occasion semblable à celle-là ? Et se la voir enlever par le sot emportement d’une tête chaude !… Mais il faut se résigner ; que la volonté de Dieu soit faite. »

Pendant tout le déjeuner, l’Antiquaire ne cessa de rabâcher de la sorte, suivant l’expression de sa sœur ; et en dépit du miel, du sucre et de toutes les douceurs qu’offre ordinairement en Écosse la table du déjeuner, ce repas, pour celles qui le partageaient avec lui, se ressentait de l’amertume de ses réflexions et de son humeur. Mais elles connaissaient le naturel de l’homme, et, comme le disait tout bas miss Grizzel Oldbuck à son amie miss Rebecca Blattergowl, Monkbarns aboyait plus qu’il ne mordait.

Le fait est que M. Oldbuck, qui avait éprouvé les plus vives inquiétudes tant que son neveu avait été véritablement en danger,

  1. L’ouvrage d’or a. m.