Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/275

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parait de l’adepte ; chacune le prit par un bras, et, exerçant un degré de force auquel il aurait été incapable de résister, quand bien même la peur lui eût permis de l’essayer, le mirent sur le pavé de l’église, et s’assirent chacune à côté de lui comme pour le retenir. Convaincu qu’il était entre les mains de mortels semblables à lui, l’adepte aurait bien voulu leur faire quelques questions ; mais tandis que l’un étendait la main vers la voûte, d’où la voix du prêtre se faisait distinctement entendre, l’autre plaçait son doigt sur ses lèvres, en signe de silence, recommandation à laquelle l’Allemand jugea que le plus prudent était d’obéir. Ils le retinrent ainsi jusqu’à ce qu’un sonore alléluia, résonnant sous les arceaux déserts de Saint-Ruth, fût venu terminer la singulière cérémonie dont le hasard avait voulu qu’il fût témoin.

Quand l’hymne eut cessé de retentir, un de ses noirs gardiens lui dit d’une voix et dans un dialecte qui lui étaient familiers : « Eh ! bon Dieu, monsieur Dousterswivel, est-ce vous ? ne pouviez-vous pas nous faire savoir que vous désiriez assister à la cérémonie ? Milord n’a pas pu être content que vous y soyez venu en cachette de cette manière.

— Au nom du ciel, je fous en conjure ! dites-moi qui fous êtes ? demanda l’Allemand à son tour.

— Qui je suis ? et qui voulez-vous que je sois, si ce n’est Ringan Aikwood, le fermier de Knocwkinnock. Et que pouvez-vous faire ici, à cette heure de la nuit ? à moins que vous n’y soyez venu pour assister aux funérailles de la dame.

— Je fous déclare, mon pon monsier le fermier Aikwood, dit l’Allemand en se levant, que cette même nuit ch’ai été assassiné, folé et mis en béril de ma fie.

— Pour un homme assassiné, vous avez passablement l’usage de la parole ; et qui diable aurait pu vous voler ici, et mettre votre vie en péril, monsieur Dousterswivel ?

— Je fais fous le tire, monsier le fermier Aikwood Ringan ; ce n’est autre chose que ce fieux miséraple gueux de robe bleue, que vous abbelez Édie Ochiltree.

— Je ne puis croire cela, répondit Ringan ; Édie m’est connu, et il l’était de mon père avant moi, pour un homme franc, loyal, et incapable d’une action lâche. Tenez, précisément, il est à présent couché dans, notre grange, où il dort depuis dix heures du soir. Ainsi vous aura touché qui voudra, monsieur Dousterswivel, mais si tant est que quelqu’un vous ait touché, je garantis qu’Édie en est innocent.