Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/298

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crucifix et deux ou trois livres couverts de parchemin et fermés par des agrafes. Un grand tableau de Spagnoletto, d’une peinture exquise, représentant le martyre de saint Étienne, constituait le seul ornement de l’appartement.

L’habitant et le maître de cette chambre lugubre était un homme encore dans la fleur de l’âge, mais tellement flétri par les maladies et les peines de l’âme, si maigre et si décharné, qu’il n’offrait déjà plus qu’un corps décrépit et ruiné ; et lorsqu’il se leva pour aller au devant de celui qui venait le visiter, cet effort parut avoir épuisé ce qui lui restait de forces. Rien de plus frappant que le contraste qu’offraient ces deux êtres s’avançant l’un vers l’autre au milieu de l’appartement. Les joues colorées, le pas ferme, la taille droite, l’air et le maintien assuré du vieux mendiant, indiquaient la patience et le contentement dans l’âge le plus avancé de la vie et dans l’état le plus bas où l’humanité pût tomber, tandis que les yeux enfoncés, les joues creuses et le pas chancelant du seigneur, démontraient l’insuffisance de la fortune, du pouvoir, et même des avantages de la jeunesse, pour assurer le repos de l’âme et la santé du corps.

Le comte s’avança à la rencontre du vieillard, jusqu’au milieu de la chambre, et ayant ordonné à son domestique de se retirer dans la galerie, et de ne laisser entrer personne dans l’antichambre à moins qu’il ne sonnât, il attendit avec un mélange d’impatience et d’inquiétude qu’on eût fermé, d’abord la porte de son appartement, ensuite celle de l’antichambre, sur laquelle un verrou fut tiré. Lorsqu’il se fut assuré qu’il ne courait plus le risque d’être entendu, lord Glenallan s’approcha du mendiant, qu’il prit probablement pour quelque individu déguisé appartenant à un ordre religieux, et d’un ton rapide, quoique entrecoupé, il lui dit : « Au nom de tout ce que notre religion a de plus sacré, dites-moi, révérend père, ce que je dois attendre d’une communication qui m’est annoncée par un bijou qui me rappelle de si horribles souvenirs. »

Le vieillard, interdit par des paroles si différentes de celles qu’il avait attendues du puissant et orgueilleux comte, éprouva de l’embarras pour lui répondre et pour le détromper. « Dites-moi, continua le comte avec une agitation et des angoisses toujours croissantes ; dites-moi, venez-vous m’annoncer que tout ce qui a été fait pour expier un attentat si affreux est trop au dessous d’un tel crime, et venez-vous m’indiquer des moyens nouveaux d’accomplir ma pénitence d’une manière plus efficace et plus rigoureuse ? Aucun ne me fera reculer, mon père ; que mon corps su-