Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/342

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peut vous rappeler qu’une telle créature rampa jamais sur la surface de la terre.

— Continuez, dit le comte, continuez, je ne vous interromprai plus. »

Il parla d’une voix à moitié étouffée et pourtant résolue, bien décidé à ce qu’aucune irritabilité de sa part ne le privât de l’occasion d’acquérir des preuves de l’histoire étrange qu’il entendait. Mais Elspeth était épuisée par une narration continue d’une telle longueur ; les parties subséquentes de son récit furent interrompues, et, quoique très intelligibles pour la plupart, n’avaient plus cette clarté et cette concision qui en avaient caractérisé le commencement d’une manière si étonnante. Après qu’elle eut vainement essayé à plusieurs reprises d’en reprendre la suite, lord Glenallan vit qu’il était nécessaire d’aider sa mémoire en lui demandant quelles preuves elle pouvait donner de la vérité d’un récit si différent de celui qu’elle avait fait dans l’origine.

« Les preuves, répliqua-t-elle, de la naissance réelle d’Éveline Neville étaient entre les mains de la comtesse avec les motifs qui les avaient fait tenir quelque temps secrètes : on les trouvera, si elle ne les a pas détruites, dans le tiroir à gauche de l’armoire d’ébène qui est dans son cabinet de toilette. Son intention avait été de les supprimer jusqu’à ce que vous fussiez reparti pour voyager ; alors elle comptait, avant son retour, renvoyer miss Neville dans son pays, ou disposer d’elle en la mariant.

— Mais ne m’avez-vous pas montré des lettres de mon père qui me parurent, à moins que mes sens n’eussent été égarés dans cet horrible moment, avouer le lien qui l’unissait à cette infortunée ?

— C’est vrai ; et avec mon témoignage, ni vous ni elle ne pûtes avoir de doute sur le fait ; mais nous supprimâmes la véritable explication de ces lettres, qui était que votre père avait jugé convenable que la jeune demoiselle passât pour sa fille pendant quelque temps, pour des raisons de famille qui existaient alors.

— Mais pourquoi, quand vous apprîtes notre union, persistâtes-vous dans cet horrible artifice ?

— Ce ne fut, répliqua-t-elle, qu’après la communication de cette histoire supposée que lady Glenallan soupçonna que vous étiez réellement mariés, et même alors vous ne l’avouâtes pas au point de la convaincre que la cérémonie eût eu véritablement lieu. Mais vous vous rappelez, ou vous ne pouvez pas ne point vous rappeler ce qui se passa dans cette terrible entrevue !