Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/447

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Bravo, bravo, Édie ! un pays n’est jamais dans un bien grand danger, quand le mendiant est aussi prêt à combattre pour son écuelle que le seigneur pour ses biens. »

La conversation revint ensuite sur les particularités de la nuit que le mendiant et Lovel avaient passée dans les ruines de Saint-Ruth, et dont les détails amusèrent beaucoup l’Antiquaire.

« J’aurais donné une guinée, dit-il, pour voir ce fripon d’Allemand en proie aux angoisses de cette terreur que son charlatanisme lui fait inspirer aux autres, et craignant alternativement la fureur de son patron, et l’apparition de quelque lutin.

— Ma foi, dit le mendiant, il était temps que cela finît pour lui, car vous auriez dit que l’esprit de l’Enfer-Harnaché lui-même s’était emparé de sir Arthur. Mais que va devenir ce vagabond ?

— J’ai appris ce matin, par une lettre que j’ai reçue, qu’il vous décharge de l’accusation portée contre vous, et qu’il offre de faire des révélations qui rendront l’arrangement des affaires de sir Arthur plus facile que l’on n’espérait : c’est ce que m’écrit le shérif, et il ajoute qu’il a communiqué quelques renseignemens secrets importans au gouvernement, en considération desquels il doit, dit-on, le renvoyer dans son pays pour y jouer ses tours d’escroc.

— Et toutes les galeries, les roues, les grues, les machines qu’on avait faites pour Glenwithershins, qu’est-ce que tout cela deviendra ? dit Édie.

— J’espère que les ouvriers, avant de se disperser, feront un feu de joie de toutes leurs machines, comme une armée détruit son artillerie quand elle est forcée de lever un siège ; et quant aux galeries, je les abandonne : elles pourront peut-être encore servir de piège à ceux qui, avec autant de sagesse que nous, voudraient aussi lâcher la proie pour attraper l’ombre.

— Seigneur mon Dieu ! brûler toutes ces machines ! c’est une grande perte pourtant ; ne feriez-vous pas mieux de chercher à rattraper ce que vous pourriez de vos cent livres sterling sur la vente de ces objets ? » dit le mendiant d’un ton qui semblait affecter l’intérêt.

« Pas un liard, » dit l’Antiquaire avec humeur, en s’éloignant de lui de deux ou trois pas ; puis revenant et souriant à demi de son irritabilité, il lui dit : « Entre dans la maison, et souviens-toi du conseil que je te donne, de ne jamais parler de mine devant moi, ni devant mon neveu d’un phoque ou veau marin, comme vous l’appelez, vous autres.