Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/56

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

porte-moi la réponse. Va aussi vite que si le conseil de la ville rassemblé attendait le prévôt, et que le prévôt attendît lui-même sa perruque fraîchement poudrée.

— Ah ! monsieur, répondit le messager avec un profond soupir, il y a long-temps que ces jours sont passés ! Du diable si un prévôt de Fairport a porté une perruque depuis le temps du vieux Jervie ; et il avait une friponne de servante qui la coiffait elle-même avec du suif de chandelle et une boîte à drogue qui, au lieu de poudre, n’était que de la farine. Mais j’ai vu le temps, Monkbarns, où le conseil de la ville de Fairport se serait passé de son clerc, ou de son petit verre d’eau-de-vie, plutôt que de se montrer sans une décente perruque bien poudrée, bien ajustée sur le chef. Hélas ! messieurs, faut-il s’étonner que les communes soient mécontentes et se soulèvent contre la loi, quand on voit les magistrats, les baillis, les doyens et le prévôt lui-même avec des têtes aussi nues que celles de mes têtes à perruque ?

— Et aussi bien meublées au dedans, Caxon. Vraiment vous avez une excellente manière d’envisager les affaires, et je gage que vous avez mis le doigt sur la cause du mécontentement populaire, aussi juste que le prévôt l’aurait pu faire lui-même. Mais dépêchez-vous de partir, Caxon. »

Caxon se mit en route pour Knockwinnock, qui était à trois lieues de là…

Il boitait, mais avait un courage intrépide ;
II n’eût pu rendre enfin sa marche plus rapide.

Tandis qu’il est en chemin, il ne sera pas déplacé de donner quelques renseignemens au lecteur sur le propriétaire du château vers lequel il était député.

Nous avons dit que M. Oldbuck fréquentait peu les gentilshommes du voisinage, à l’exception d’un seul : c’était sir Arthur Wardour, descendant d’une ancienne famille, et possesseur d’une fortune considérable, mais embarrassée. Son père, sir Anthony, zélé jacobite, avait déployé tout l’enthousiasme de ce parti, tant qu’il n’avait fallu que des paroles pour le servir. Personne ne pressait une orange avec un geste plus significatif[1] ; personne ne savait proposer plus adroitement un toast séditieux sans donner prise sur lui aux lois pénales, et surtout personne ne buvait au succès de la cause avec plus

  1. On se rappelle que les ennemis du roi Jacques avaient pour chef ou pour appui le prince d’Orange, d’où leur vint le surnom d’orangistes. a. m.