Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/88

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étaient attachés par un mouchoir, avec un air de résolution qui fit trembler ses compagnons plus timides.

« Prenez garde ! prenez garde, Monkbarns ! cria Caxon s’attachant aux pans de l’habit de son patron, et le tirant avec autant de fermeté que sa force pouvait le lui permettre. Pour l’amour de Dieu, prenez garde ! sir Arthur est déjà noyé, et si vous tombez aussi dans l’abîme, il n’y aura plus dans la paroisse que la perruque du ministre.

— Prenez garde à vous, Monkbarns ! s’écria le vieux Mucklebackit, pêcheur et contrebandier ; Steenie Wilks, apporte ici les cordages ; et je vous réponds que nous les aurons bientôt à bord, Monkbarns, si vous voulez seulement vous retirer de côté.

— Je les vois ! je les vois ! s’écria Oldbuck ; là, tout en bas, sur cette pierre plate. Holà ! holà, ho !

— Je les vois bien aussi, reprit Mucklebackit ; ils sont ramassés là-bas comme des écrevisses par un temps de brouillard. Mais croyez-vous que vous les aiderez en restant là à crier comme un vieux hibou pendant l’orage ? Steenie, mon garçon, apporte ici le mât gardien, je les enlèverai, comme nous enlevions autrefois les barils de genièvre et d’eau-de-vie ; prends la pioche, fais un trou pour le mât, arrange solidement le fauteuil avec des cordes, assure-le bien de toute ta force. »

Les pêcheurs avaient apporté avec eux le mât d’une barque, et comme alors une partie des gens du pays était accourue par zèle ou par curiosité, on l’eut bientôt enfoncé dans la terre, où il fut fortement fixé. Une perche attachée en croix à la partie supérieure du mât avec une corde étendue tout le long et aux extrémités de laquelle on suspendit un poids très lourd, forma une espèce de grue qui offrait le moyen de descendre un fauteuil bien solidement attaché jusqu’à la petite esplanade de roc où les malheureux s’étaient, réfugiés ; leur joie, en entendant les préparatifs qui se faisaient pour leur délivrance, fut extrêmement tempérée quand ils aperçurent par quel mode précaire de transport ils allaient traverser les régions de l’air. Le fauteuil se balançait à une toise environ au dessus du lieu qu’ils occupaient, obéissant à toutes les impulsions de la tempête et du vent, et dépendant entièrement de la solidité d’une corde qui, au milieu de l’obscurité toujours croissante, ne paraissait plus qu’un fil imperceptible. Outre le danger de confier une créature humaine aux espaces vides de l’air dans une si frêle machine, il y avait le danger plus terrible encore que la chaise et celui qui l’oc-