Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/97

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de même au gouffre ou à la gloutonnerie du ministre ! Tout a été avalé, je suppose ?

— Fi, Monkbarns ! vous parlez comme si nous étions tout-à-fait au dépourvu de viande dans la maison. Pouvais-je faire autrement que d’offrir à cet honnête homme de se rafraîchir et de se restaurer après être venu du presbytère ici ? »

Oldbuck répéta, moitié en sifflant, moitié en chantant, ce vieux refrain écossais :

« De boudins blancs d’abord on s’était régalé ;

Les noirs y passèrent ensuite ;

Et l’on buvait et l’on mangeait si vite,

Que moi-même, je pense, on m’aurait avalé. »

Sa sœur se hâta d’apaiser ses murmures en proposant quelques autres restes du dîner. Il parla d’une autre bouteille de vin de Porto, mais recommanda de préférence un verre d’eau-de-vie, qui était réellement excellente. Comme aucune instance n’avait pu déterminer Lovel à endosser la robe de chambre à fleurs et le bonnet de velours, Oldbuck, qui prétendait à quelque connaissance de l’art médical, songea à s’aller coucher le plus tôt possible, et proposa d’envoyer le lendemain de bonne heure l’infatigable Caxon à Fairport pour lui chercher du linge et des vêtemens.

En entendant dire pour la première fois que le jeune étranger devait être leur hôte durant la nuit, miss Oldbuck fut frappée d’une telle surprise que, sans la prépondérance du poids qui encombrait sa tête et que nous avons déjà décrit, ses cheveux gris se seraient hérissés de manière à renverser tout l’édifice.

« Que Dieu ait pitié de nous ! dit la vieille fille confondue.

— Qu’avez-vous donc, Grizzel ?

— De quoi parliez-vous en ce moment, Monkbarns ?

— De quoi je parlais ? n’avez-vous pas entendu ? Je disais que j’avais besoin d’aller me coucher, ainsi que ce pauvre jeune homme, auquel il faut faire apprêter un lit sur-le-champ.

— Un lit ! Dieu nous garde ! s’écria de nouveau Grizzel.

— Eh bien, qu’est-ce que tout cela signifie ? n’y a-t-il pas assez de chambres et de lits dans la maison ? N’était-ce pas anciennement un hospitium, dans lequel, j’ose le dire, on donnait à coucher tous les soirs à une vingtaine de pèlerins au moins ?

— Monkharns ! qui sait ce qu’on y faisait ! il y a si long-temps : mais de nos jours ! Ce n’est pas pourtant qu’il manque ici de lits, ni de chambres non plus ; mais vous savez bien qu’on n’y a pas cou-