Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/56

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

multiplicité des escaliers qui exerçaient les jambes de nos ancêtres au quinzième siècle et bien auparavant, et semblaient parfois n’avoir été construits qu’à ce seul dessein.

Les façades variées et nombreuses de cet édifice irrégulier étaient, comme le docteur Rochecliffe avait coutume de le dire, un véritable banquet pour l’amateur d’architecture antique, puisqu’elles offraient des modèles de tous les styles depuis le pur normand d’Henri d’Anjou jusqu’à l’architecture mêlée, moitié gothique, moitié classique, de la reine Élisabeth et de son successeur. Aussi le recteur était-il non moins éperdûment amoureux de Woodstock qu’Henri le fut jamais de la belle Rosemonde ; et comme son intimité avec sir Henri Lee lui permettait d’entrer en tout temps à la Loge royale, il avait l’habitude d’y passer des journées entières à parcourir les anciens appartements, à examiner, à mesurer, à étudier, à inventer d’excellentes raisons pour expliquer les bizarreries de la construction, qui sans doute ne provenaient que de l’imagination fantasque d’un artiste gothique. Mais le vieil antiquaire avait été expulsé de son rectorat par l’intolérance et les troubles d’alors, et son successeur, Nehemiah Holdenough, aurait considéré un examen laborieux de la sculpture et de l’architecture profane des papistes aveugles et altérés de sang, aussi bien que l’histoire des amours scandaleux des vieux monarques normands, comme un crime non moins impardonnable que de s’agenouiller devant les veaux d’un Béthel ou de boire dans la coupe d’abomination. Revenons à notre histoire.

« C’est, » dit l’indépendant Tomkins, après avoir soigneusement examiné la façade de l’édifice, « c’est un bien rare monument de la vieille antiquité que cette Loge royale si mal nommée ; en conscience, je me réjouirais bien si je la voyais détruite, oui, réduite en cendres, si ses cendres en couvraient le torrent de Cédron ou tout autre, afin que la terre n’en gardât aucun souvenir impur, et que rien ne rappelât désormais les infamies dont nos pères se sont souillés. »

Le garde l’écoutait avec une secrète indignation, et commençait à se demander intérieurement, si maintenant qu’ils étaient seuls et sans risque d’être de sitôt interrompus, il n’était pas appelé par devoir à châtier le rebelle qui tenait un langage aussi diffamatoire. Mais il se rappela fort heureusement que l’issue des combats était douteuse, qu’il avait contre lui le désavantage des armes, et surtout que, même s’il était vainqueur, il s’exposait pour la suite à de