Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/123

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en eût, et quoiqu’il se tuât de crier, par la fenêtre, qu’on fermât toutes les portes et surtout celle de la cour, personne, me voyant toute en pleurs, n’osa lui obéir. Je fis le tour de la rue, où il y avoit grand monde ; dans ce triste état, seule, à pied, et en plein midi pour me rendre à mon asile ordinaire. Ce scandale fut l’effet de la prévoyance qu’il avoit eue de faire murer les portes qui communiquoient du palais de mon frère au nôtre, et par où je m’étois sauvée l’autre fois ; mais cette précaution fit juger, à ceux qui la surent, qu’il n’avoit pas dessein, si je retournois avec lui, de me traiter mieux que par le passé, quand il prenoit ainsi ses sûretés pour l’avenir.

D’abord que je fus chez mon frère, j’écrivis au Roi pour lui rendre raison de ma conduite ; et Mme la Comtesse m’emmena à l’hôtel de Soissons ; mais au bout de cinq ou six jours, M. de Louvois m’étant venu proposer de la part du Roi d’entrer dans quelque couvent, elle ne le voulut pas, et elle négocia si bien, qu’on obligea M. Mazarin à me venir prendre, à condition qu’elle se raccommoderoit avec lui. Mon frère s’en alla d’abord après en Italie, en partie pour faire voir qu’il ne tiendroit pas à lui que je ne demeurasse en bonne intelligence avec mon mari ; mais elle ne fut jamais qu’apparente ; et pendant trois ou quatre mois que nous fûmes ensemble, il ne se passa point de jour que je ne fusse obligée de quereller, quelque besoin et quelque envie que j’eusse de vivre en paix.

Au bout de ce temps, il voulut aller en Alsace, et au lieu de m’accorder toutes choses pour m’obliger à l’y suivre, comme j’y étois résolue, il fut